Regarder le lever du jour ne requiert pas l'usage de la parole, et pourtant il y a communication, échange. Il y a rencontre, acte quasi sexuel, pénétration, échange de fluides ; ouverture, jouissance à une réalité alter,

                                                une altération,

                                                une aliénation.

Aliénation ne veut pas dire faire passer sous la domination de l'autre, mais bel et bien se mélanger, fusionner, quitter son enveloppe charnelle et terrestre pour devenir son stade premier, revenir à son origine, à son pro-atos ; devenir autrement soi-même dans l'Autre déjà approprié depuis la Nuit des Temps.

La beauté du ciel à son lever provoque chez celui ou celle qui le regarde, qui la contemple - et surtout qui sait le regarder et la contempler - une extase orgasmique,

                                                                         un orgasme extatique dans lesquels l'Etre se perd. Nous sommes d'abord éblouis par sa beauté, puis dominés par elle, tellement la vision en est radieuse.

Tous les organes se perdent, toutes les facultés de la limite physique de l'enveloppe corporelle de l'humain se perdent...

Lors de cet échange, de ce contact, le corps n'est plus un obstacle, mais un intermédiaire, un hôte qui n'a plus que pour seule fonction de recevoir ce qui est transmis, et de le retranscrire de façon à être accepté, compris,

de façon à en produire l'expérience... quelque chose le dépasse. Un rattachement à quelque chose de plus grand, de plus universel, une totalité d'Être. Nous ne faisons plus qu'un avec cet élément. Cet élément que nous avons inconsciemment éloigné de notre état d'Être, car le ciel est partie de la nature, et devient lors de ce dialogue, un élément auquel nous devenons partie intégrante, mais aussi et surtout constitutif d'un événement où l'antédiluvien nous rappelle que nous n'avons toujours fait qu'Un.

D'abord observateurs, nous fusionnons avec lui. Nous re-devenons acteurs de cet élément aliéné.

17 mars 2005