Homme de lumière, je suis devenu bête de la nuit. Pendant à mes crocs, son petit bras détendu. Gouttes qui cliquètent dans l'écuelle, la rue se réveille à son appel. Rugissons ensemble, de peur et de fureur, un tueur et la douleur. La petite pleure et sanglote, blanche et froide comme l'Astre. Quand elle ne trouve plus en elle l'envie de vivre, je vois sa vie s'envoler. Griffes déchiquètent sa cervelle, je tue pour tenter le destin. Qu'on vienne me chercher ! Qu'on vienne m'ôter la chair, qu'on m'apporte les fers ! J'attends le bûcher !
Le voici, tel une ombre dans la nuit. Clinquant, bruyant, bientôt mourant. Nul courage ne vaut le sien, preux chevalier de sang. L'épée brandie, cheveux au vent, il a du cœur et veut le mien. Il approche furibond, voit la petite et blêmit. Son cri déchire la nuit, il fend l'air de sa lame pour fendre mon corps. Naïve tentative, je m'attendais à plus rude combattant ! D'un coup de patte, j'envoie valser le héros. Rien ne l'arrête, il se relève et rue. Son âme grandit, mes griffes aussi, dommage pour lui ! J'attrape ses bras et les arrache, sa tête disparaît dans ma gueule. Son crâne se disloque entre mes mâchoires tandis que son dernier souffle gargouille dans sa gorge noyée dans son sang. Triste fin pour une piètre faim, la fillette est plus tendre. Le petit bras suffira, le reste pourrira dans le caniveau. Les vers s'en nourriront jusqu'à ne laisser qu'un squelette bruni.
Tout est calme. La rue, les morceaux de cadavre, moi. Le sang a arrêté de couler, laissant une mare où boit un chat. Il lève la tête, ses grands yeux jaune me considèrent avec étonnement. Comme s'il savait. Il sait quelle aberration de la nature je suis, quelles horreurs que j'ai commises, quels crimes torturent mon âme. Je jurerais entendre sa pitié. Le voilà qui s'approche, avec un léger miaulement, il se frotte à ma jambe. Petit orphelin, je n'ai rien à t'offrir. Le jeune père et sa fille gisent dans ton repas, il n'y a plus rien pour toi ici. Je rentre chez moi.
Les toits sont chauds cette nuit. La Lune a eu la bienveillance de m'éclairer, et maintenant de me réchauffer. J'écoute le son d'un million de cœurs, chaos inimaginable de l'existence humaine. Un million plus un, minuscule, dans ce corps de félin. Il me suit habilement sur les tuiles. Je n'ai pas le temps de refermer la fenêtre qu'il se pelotonne sur le lit. Je n'ai pas le cœur à le chasser. Non, je n'ai pas le cœur. Mais soudain, le voilà qui crache. Les yeux écarquillés, le poil hérissé, il va bondir. Il semble grandir dans l'obscurité. Ses pattes s'allongent, sa tête grossit, ses oreilles disparaissent. La Lune disparaît à ce moment, la pièce plonge dans le noir total. L'odeur a changé, elle s'est faite plus forte, plus acide. L'air s'alourdit, et le plancher craque. Immobile, j'écoute. Seul mon sang bat à mes oreilles. Puis cette main.
La pâle lueur revient, je découvre un bras nu. Il sent le fer et l'argile, comme tout ce qui vit sur ces toits. C'est celui d'une femme. La main s'est posée sur ma joue. Je tressaille, elle retire sa main dans un sursaut. Hésitante, elle la replace. Le geste se transforme en caresse, et mes yeux se ferment sans m'en prévenir. Elle se rapproche. Je sens ses doigts sur ma nuque, une autre main agrippe la mienne. Une chaleur étouffante émerge en moi, je crois qu'elle se rapproche encore. Deux seins se pressent contre mon torse, un bassin généreux se colle contre le mien, et sa main presse sur ma nuque. Elle se hisse sur la pointe des pieds, ses lèvres atteignent mon oreille. Murmure. Tout s'évanouit.
Ceci est un rêve. Comme chaque rêve, il a sa signification. Quelle est-elle d'après vous ?
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Style : Nouvelle | Par ifrit | Voir tous ses textes | Visite : 564
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Commentaires :
pseudo : obsidienne
il signifie que tu es d'une santé mentale éclatante et que tu as une écriture prodigieuse. Et que c'est bon !
pseudo : BAMBE
Sous des rayons de lune un vorace félin qui trouve sa féline, un texte à dormir debout. CDCoeur!
pseudo : Dolly_Dereck
Et bien Si ! Le texte " Dans un Monde en noir et blanc " est bien de Moi, sauf le titre ne l'ai pas. Alors renseigne-toi avant de dire quelque chose de faux. Cordialement, Dolly. Bye.
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