A un ex-compagnon, qui m’a permis de me re-trouver, même si là n’était pas son souhait premier:
- Qui, grâce à ses paroles, m’a fait prendre conscience qu’il y avait pire que le creux de la vague: le vide, tout court.
Me rappelant combien le langage pouvait devenir un outil de persuasion dont il faut savoir se jouer, au risque de voir son âme hésitante plier, sa volonté chanceler, son assurance vaciller, et être amené là où personne ne voudrait aller, assoiffé, sur une route aride, déserte, ne menant nulle part.
Réussissant à me démontrer tout en le démantelant, la fragilité de mon réseau amical ( "t’as vu? ils ne t’aiment pas tant que ça, tes amis..." ), et, qui, après avoir éliminé les bipèdes voulant encore établir un quelconque lien avec moi, s’est laissé aller à m’exhiber comme un trophée, puis m’a isolé, replongé dans les eaux troubles, nauséabondes et terrifiantes de mon enfance: entretenant l’illusion que je devrais, dorénavant, chaque seconde de ma vie devenant sienne, l’honorer, lui, le roi de la Savane, et veiller...
Me prêtant de nouvelles et multiples fonctions , me persuadant presque de ma nécessité d’être esclave, femelle, guérisseuse, proie, gibier... avec ce langage si agrémenté, si assaisonné de sanglots, tout bien émotionné, tantôt relevé de mots amoureux, de farineux mensonges, de vérités poudrées, tantôt salé par des propos parsemés de pensées venimeuses, une cuisson à l’étouffée particulièrement asphyxiante, arrière goût de Cayenne, concluant ainsi:” Par cette enclume que je t’accroche au cou, je te fais mienne...”
C’est pourquoi aujourd’hui, c’est avec grand plaisir que je découpe les mots lorsqu’ils sont imprimés, les faisant préalablement tremper afin que leurs motifs déteignent, pour mieux les mixer et les introduire à la terre glaise: car il me faut sentir, sous mes doigts, leur pouvoir, et les manipulant (quelle joie), construire et structurer, m’alléger et m’élancer vers des formes imprégnées. Ne souhaitant pas enchaîner, mais libérer cette pâte à verbes... pleine et riche de silences.
Un ex compagnon, un de ces méandres qui ont contribué à ma mue.
Oui j’ai écouté, seule, et appris la richesse du désert, et goûté ses multiples grains de sable; avant que le calme ne devienne folie, que la tempête ne m’ensevelisse, j’ai senti, in extremis, cette force se frayer un chemin dans mon corps, ramassant mes membres éparpillés, pour l’unifier. Instant. Grâce. J’ai senti un formidable instinct naturel, ancestral, reptilien.
Et j’ai su que l’autre n’aurait jamais ma peau.
Même morte.
Même pas en sac à mains.
Même pas
(2007)
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Style : autre | Par VIVAL33 | Voir tous ses textes | Visite : 681
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Commentaires :
pseudo : obsidienne
Que ça doit faire du bien de pouvoir écrire des mots pareils, de pouvoir les relire... Tu fais du bien en tout cas, à te lire, à te comprendre.
pseudo : alnilam
Dans les violences conjuguales, on commence par isoler l'autre, on le vide de ses amis. Mais il arrive parfois que l'autre soit si fort que ...
pseudo : scribio
"Histoires qui aliènent" le prix que tu as payé pour arracher ton ancienne peau et renaître ou naître.
pseudo : VIVAL33
Merci beaucoup pour vos commentaires. Amicalement.
pseudo : BAMBE
Bravo à toi princesse des mots, toi qui a su dominer le Verbe pour en faire un allié.
pseudo : VIVAL33
Merci à toi BAMBE!
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