En arrivant dans ce jardin, elle a abordé quelques personnes pour leur parler de ses souffrances, de vieux maux qu'elle avait mis en mots, histoire de tirer un trait définitif sur un passé encore frais et qui l'a construite. Au fil de la discussion, elle a laissé fleurir ses idées politiques et tout le monde a perçu sa sensibilité et sa capacité d'indignation. Il circule dans ce jardin des odeurs qui ressemblent à ses valeurs et qu'elle a cultivées sans relâche, parce que le monde, pense-t-elle, doit se plier aux termes de générosité, de solidarité, de dignité. C'est ce dernier mot peut-être qui la caractérise le mieux : elle travaille à la dignité, la sienne, celle des femmes, celle des enfants, les siens aussi, celle de l'humain. Rendre digne, c'est remettre au bon rang ; alors sans cesse elle égrène des mots, acérés parfois, tendres souvent, primesautiers aussi, pleins de finesse et de couleurs qui la hissent au rang auquel elle aspire, celui de femme, celui de mère, celui de compagne, celui de poétesse, celui d'être humain, reconnaissable à sa jovialité tourmentée et aux efforts nécessaires.
Son pseudonyme crisse comme un traineau sur la neige de sa montagne proche, un traineau où elle aurait soigneusement rangé ses bagages de français et de latin. Parce qu'elle voulait que l'on comprenne sans le dire qu'elle était écrivaine.
Et elle a fait de ce jardin son jardin secret, puisqu'à l'évidence, des secrets, elle en aurait de moins en moins pour nous. Elle est pleine de paradoxes aussi.
« Scribio », j'ai compris doucement qu'elle était une grande poétesse, parce que je comprends doucement les belles choses qui m'arrivent, comme ses textes par exemple