J'ai une envie irrépressible d'écrire ce soir. Je veux parler de mots. Ceux dans lesquels nous crions nos maux. Je suis une mercenaire du langage, de la parole. Je cherche quel mot représenterait cette vérité que je n'arrive pas à atteindre. Je crois que, si un jour une émotion nous serrait le coeur, nous serions contraints de mélanger plusieurs langages pour faire une traduction parfaite et pleine de cette émotion que l'on veut exprimer. Simplement parce que l'on veut la crier au monde entier. Je crois dans les mots mais je ne crois pas en Dieu. Comment vous expliquer?  Les mots ne savent pas mentir et nous, nous nous berçons d'illusions en se disant que l'on a ce que l'on a, que l'on est ce que l'on est grâce à un être supérieur. Non. Ce que l'on a, on se bat pour l'avoir. Ce que l'on est, c'est l'expérience de la vie qui nous l'apprend. Et si seulement les gens arrivaient à voir comme la vie est belle et qu'il suffit d'ouvrir les yeux! Prenez une phrase simple. Et répétez-la plusieurs fois. Maintenant, essayez de lui trouver un sens; c'est impossible. Savez-vous pourquoi? Parce que vous l'avez vidée. Vidée de ce qu'elle voulait dire, de son essence, du sens de ses mots. Cela n'est plus maintenant qu'une suite de mots et de lettres désarticulés. Stupidité du cerveau humain. C'est comme ces mots que les gens choisissent à tord et à travers et dont ils ne savent pas le sens et ne connaissent pas la force. Stupidite humaine. C'est obscène d'utiliser les mots comme des jouets alors que cela sort de notre bouche et de notre coeur. Et puis, il y a ces mots dont on se sert pour écrire et dire des horreurs. Ces immondices de l'Histoire, ces hommes qui ne respiraient que l'air de leur cruauté. On écrit un texte comme une musique. Et la musique, c'est beau pourtant. Alors pourquoi tant de laideur dans l'humanité entière? Pourquoi rendre laids des mots si beaux? Pourquoi les écorcher avec notre égoïsme? Pour finir, il y a ceux qui ont été créés à cause des hommes, des horreurs qu'ils ont commises. Des mots qui n'existaient pas au départ et qui sont nés de la bêtise humaine. Après tout, peut-être que les mots, eux aussi, souffrent et, qu'à chaque fois que l'on écrit une lettre, puis une autre, nous donnons naissance à quelque chose d'invisible mais de bien réel.

Note de l'auteure: Je tiens à dire que je ne fais pas le procès de notre société, ni du monde et des croyances dans lesquels nous sommes plongés; ce que j'écris est lié à un instant, une pensée vagabonde, n'étant plus forcément vraie au moment où je décide de la partager.