Juin 2016.

Hank avait vérifié une dernière fois son sac, pour voir s'il n'avait rien oublié.  Et puis, comme il en avait maintenant pris l'habitude, il relut encore le contrat qu'il venait juste de signer.

Il referma la porte de son appartement derrière lui et il emprunta le monorail jusqu'au Centre.

L'immeuble n'avait rien d'accueillant.  L'immense façade était noircie par le temps et la pollution, les fenêtres avaient été remplacées par des briques de sécurité transparentes et sur la corniche, des dizaines d'yeux électroniques vérifiaient les alentours.

Via le haut‑parleur, il annonça au gardien le but de sa visite et il dût se placer dans l'angle de la caméra d'identification.  Les lourds battants du sas d'entrée s'ouvrirent et il fut guidé jusqu'à l'Auditeur.

L'homme étudia le dossier de Hank et avant d'y imposer les tampons officiels, comme de coutume, il lui offrit un bon cigare et un verre d'alcool.

Ils restèrent là, sans rien dire, à se regarder et à se juger mutuellement.  Enfin, l'Auditeur estampilla le Contrat et remit le double à Hank ainsi que le Permis.

Hank refit le chemin inverse et quelques minutes plus tard, il se retrouva dans la rue.  Il lui restait un peu moins d'une heure pour accomplir les dernières choses qui lui tenaient à coeur.  Il prit le métro aérien et se rendit chez "Smith&Wesson", l'Armurerie Nationale.

A nouveau, il se conforma à tout une série de mesures de sécurité et de démarches administratives et, enfin, il eut accès au magasin.  Il montra son Permis et choisit un ancien modèle: un "Bereta 97 à visée laser".  Le préposé emballa l'arme dans une petite valisette métallique et remit à Hank la clé du Box d'attente et la fiche officielle qui indiquait: Disponible le 1^er juillet 2026.

Hank quitta l'armurerie et retourna au Centre.  Comme il lui restait 10 minutes, il relut une dernière fois sa fiche:

Condamnation par le Tribunal de Grande Instance à une peine d'emprisonnement de 10 ans, pour meurtre avec circonstances aggravantes.

Le 30 juin 2016.

A 16 heures précises, il s'adressa à nouveau au haut‑parleur et il disparût ensuite derrière la lourde porte de la Prison ...

La vie carcérale se déroula normalement, presque bien !  En tous cas, mieux qu'il ne l'avait imaginé.  Il faut dire qu'il s'était retrouvé en compagnie de Volontaires, de gens biens, pas des voyous ou autres renégats puisqu'en ce 21^ème siècle, la peine de mort avait été rétablie pour les véritables délinquants de tout ordre !

Le 1^er juillet 2026 à 16h05', Hank fut libéré.  On lui rendit l'original du contrat auquel était agrafée la médaille d'acquittement portant le chiffre 1 (1 pour une décennie)...

Hank alla directement chercher sa commande de chez "Smith&Wesson" au bureau des Objets Placés et il retourna chez lui.

Il passa au bar du quartier prendre un verre et, à 19h00, comme la Loi le prescrivait, il en ressortit, son Bereta ajusté à la hanche.

Il prit le monorail et se rendit chez son ex‑femme.  Cela faisait plus de 11 ans qu'il n'avait plus vu Tess, mais lorsqu'elle lui ouvrit la porte vitrée, il la reconnut d'emblée.

Tout au long de son incarcération, il avait été rongé par le doute de ne plus pouvoir la reconnaître; ça avait été sa seule préoccupation majeure, (avec la hantise qu'elle soit déjà morte), mais là, c'était bien elle, un peu vieillie, mais toujours odieusement belle !  Il empoigna son revolver et l'abattit de 6 coups en plein front !

Les sirènes d'alarme publiques retentirent et à peine quelques instants plus tard, une brigade des Forces de l'Ordre atterrit !  Hank fut vite maîtrisé et désarmé.  Le chef de l'équipe d'intervention lut le document que Hank lui tendit:

Contrat:

Incarcération prématurée ‑ Peine anticipative.

Condamnation par le Tribunal de Grande Instance à une peine d'emprisonnement de 10 ans, pour meurtre avec circonstances aggravantes.

Le 30 juin 2016.

Dont acte le 1/7/2026.

Le cadavre de Tess fut embarqué à bord de l'aérobus et les hommes repartirent tout en s'excusant.

‑ Y-a pas d'mal, vous faites vot' boulot  ! leur lança Hank en remontant le col de sa veste.

Le soir, Hank sortit du tiroir de son dressoir l'extrait du Bulletin National Législatif et il relut une toute dernière fois l'article de Loi du 02 février 1998.

"Voté à l'unanimité, ACT, 2000/334.IITH ‑ 009.  Il sera possible à tout résident de la Nation d'effectuer anticipativement une peine d'emprisonnement pour un crime qu'il envisage de commettre.  Une fois la peine exécutée, le repenti pourra librement et légalement agir en toute immunité"

Hank jeta le papier et alla dormir, l'esprit en paix, le coeur léger.

FIN