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Le Mot par L.

Le Mot

Un mot, 
Ponctué d'un soupir 
Que j'ai répété sous mille formes et au bas de mille pages 
Si souvent recopié qu'il en rempli les marges 
Du livre de ma vie 
 
Tant de fois, j'ai voulu m'en saisir,  
Le plier à mes lois,  
Mes désirs, 
Savourer à la coupe le vin de son mystère,  
Goûter le fruit de son impermanence, 
Le regarder mûrir, l'étudier à la lettre et tromper sa patience
 
Tant de fois ressassé, brandi à tort 
Tant de fois malmené  
Qu'il m'a fui, délaissé,
Abandonnant dès lors tout semblant de valeur, 
D'écho, de résonance, 
Se refusant à la plume comme au cœur 
Préférant aux serments la beauté des mirages 
Et l'espérance d'un âge où, 
 
Enfin 
 
Son sens retrouverait sa vertu  
Et sa vertu un sens... 
Comme en cette ère lointaine - peut-être imaginaire -
Où nulle menace ne pouvait l'effrayer, le taire ou l'affaiblir 
Où l'on pouvait mourir afin de l'épeler, 
Et ne souffrir que plus de ne l'avoir encore
 
Cette ère où en une nuit, il élevait des empires qu'il abattait au petit jour 
Donnant des ailes aux Rois 
Et des couronnes aux Fous 
Le courage aux Soldats de se mettre à genoux et aux Pions de se fondre en un unique damier. 

Cette ère où les étoiles se jetaient dans la Mer 
Pour finir échouées de rivages en rivages 
Portées de voile en voile 
Vers leurs destinataires,
Où la Muse n'avait rien d'un spectre 
D'une ombre en demi-teinte 
Vendant l'inspiration à qui peut l'acquérir 
Avec moins de talent que de résignation 
 
Où le Héros, au-delà des exploits, 
Pour quelques braises, rendait les armes 
Et pour une flamme épousait l'autre Foi 
 
Où l'Exilé, par-delà ses errances, 
Trouvait sa Terre et par-là,  
Sa promise 
Embrassant l'Univers dans cette reconnaissance
 
Où le Poète, en dépit de son art, 
Devait se prosterner pour une déclinaison 
Le plaisir de scander  
Deux syllabes alchimiques 
Deux êtres et deux bougies bercées de firmament 
 
Moi,  
Pour le reconquérir 
J'aurais affronté des tempêtes, dompté des ouragans, 
Livré des guerres à m'en tourner la tête 
Sans une seule fois verser le sang. 
Debout sur l'horizon, triomphal, 
J'aurais vouvoyé les abysses et tutoyé les nues 
Comblé des précipices, des abîmes, à mains nues. 
D'un bond, 
Franchi le gouffre immémorial, 
Apprivoisé l'espace dans ses vastes étendues 
Sans le ferrer aux chaînes de mon érudition. 
 
Porté par la passion, 
J'aurais inventé des couleurs pour colorer mes rêves 
Et rêver avec eux d'insaisissables fresques, 
Dessiné dans un sable d'une infinie chaleur 
Pour renaître au brasier d'un bonheur éphémère. 
 
Aussi, 
J'aurais signé des trêves, poursuivi des chimères 
Dépouillé l'idéal de son inconsistance 
Troqué ma lassitude contre un peu d'innocence 
Fait de cette naïveté 
L'étendard de ma solitude et de cette solitude, 
L'insigne blason de ma sérénité. 
 
Guéri de mon orgueil, j'aurais laissé le soleil m'éblouir, 
La nuit me consoler, son parfum m'étourdir, 
Chéri les roses, au lieu de les cueillir, 
Refusé de grandir,  
Au lieu de m'en accommoder 
 
Si j'avais su, j'en aurais gravi, des montagnes ! 
Des cimes où l'Hiver s'attardait en polissant la neige, 
Des cols où le Printemps n'osait s'aventurer, 
Où la valse des Saisons se trouvait prise au piège, 
D'un écrin de diamants.  
J'en aurais gagné, des médailles, 
Porté, des cicatrices, des blessures, où que j'aille ! 
Plus que tout,  
J'aurais frappé les heures jusqu'à tuer le Temps  
Mis en pièce le théâtre de mon incomplétude 
Monté des Tragédies et chevauché le vent 
 
 
S'il le fallait, oui, 
Si j'avais ne serait-ce qu'une chance, 
J'irais danser sur des lieues à la ronde  
Pour changer le monde de mon étincelle 
- Sans prétendre être Dieu, puissant ou immortel -, 
Reléguer au Passé mes grandeurs à venir 
Et bâtir un palais pour mieux y renoncer 
 
J'apprécierais l'ivresse sans chercher de raison 
Apprendrais à sourire plus que par politesse 
Parlerais de Déesse et plus de Panthéon 
 
Si je pouvais, 
Je mettrais des accords jusque dans le silence 
Et à force de silences, jouerais une symphonie.
 
J'ajouterais aux trésors une rime inachevée 
Dont la finalité sera un solennel 
 
Toujours. 
 
Je choisirais la voie qui sans cesse me ramène 
Aux promesses d'un Eden  
Sans plus de certitudes qu'un lendemain de bal, 
Si pâle qu'il masquerait le ciel. 
 
Décillé, 
Je renoncerais au trône avant même d'être page 
Sortirait de sa cage l'oiseau qui sommeillait, 
Il n'y aurait d'Absolu qui vaudrait un nuage, 
De sage qui n'ait d'humilité, 
De prière exaucée, qui ne soit un partage. 
 
 
Le mot, alors, serait-il mien ou lui appartiendrais-je ? 
Pourrais-je, grâce à lui, 
Passer de l'or au plomb sans la moindre disgrâce ? 
Ne connaître la misère, même dans le dénuement ? 
M'apporterait-il la splendeur du couchant sur un lit de rosée,  
Le chant du Rossignol et l'auréole d'un Ange ? 
 
D'un Saint, la robe immaculée ? 
 
Saurait-il me prêter ce qui ne m'appartient, sans rien demander en échange ? 
Retrouverait-il, dans ma bouche, 
Ce poids qu'il n'avait plus,  
Ce fil que j'avais émoussé  
A force de m'en servir ? 
Pourrais-je, par ma sincérité, 
Lui rendre ce qu'il avait perdu ? 
 
 
Cette âme,  
Ponctuée d'un soupir 
 
Et le Verbe éternel de son Accomplissement. 
 

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Commentaires :

pseudo : PHIL

LE MOT.UNE HISTOITE SANS FIN

pseudo : monalisa

L TU SUBLIMES DIVINEMENT LE MOT QUI PASSIONNE NOS ÂMES NOS COEURS NOS ESPRITS ET QUI NOUS SUIT A CHAQUE SECONDE DE NOTRE EXISTENCE. IL EST UN JOYAU QUI BRILLE SUR LA FEUILLE DE LA VIE. UN MYSTÈRE QUI TAPISSE LE TEMPS. UNE ÉNIGME QUI ENCRE LE SENTIMENT DU SAVOIR. MAGNIFIQUE L . CONTINUES A NOUS ÉMERVEILLER AVEC LE MOT QUE TU POÉTISE SI BIEN.

pseudo : Ari07

...Que dire de plus...C'est magnifique...merci A+