1. Épilogue

Sous un soleil de plomb, tandis que son ami Frank (qui s'appelait à présent Franco) accostait en douceur, Terry (qui avait troqué son identité pour Django) descendit du bateau pour attacher l'amarre.

- «L'apewo est pwêt patwons» baragouina un noir derrière le bar de la plage.

- «Nous arrivons!» répondit Terry, méconnaissable. Il avait laissé pousser sa barbe et ses cheveux, il avait un peu grossi et avait la peau bronzée comme celle de tous les gens qui résident là-bas.

Les deux amis trinquèrent à l'amitié, comme ils le faisaient tous les midis depuis près de 24 mois. Franco adressa un petit coup de coude à Terry en lui désignant du menton une jeune femme allongée sur le sable fin où elle bronzait, une revue "people" en éventail sur le visage. En couverture du magasine, on pouvait voir le portrait idyllique de Ange et Terry qui s'enlaçaient. Frank fit un clin d'oeil à Terry qui lui sourit en guise de réponse.

- «J'ai apporté des photos, Mec, tu veux les voir?» dit à l'homme assoupi aux côtés de la jeune femme un autre type fagoté de guenilles malpropres qui déambulait de parasols en parasols en tentant de revendre illicitement des photos à caractère pronographique.

- «Encow lui jé vé le chassé patwon, t'inquiète ça fé twoi jou' qui vient ennuyer les clients». Terry sourcilla en n'écoutant pas réellement le barman. Où avait-il déjà entendu cette phrase prononcée de cette voix nauséeuse?

- «Lève-toi l'ami, celle-là va te plaire!» insista encore le mendiant à l'adresse du touriste indifférent.

- «Laisse-moi faire!» ordonna Terry en chuchotant au barman.

Il s'approcha du prétendu photographe qui empestait l'alcool bon marché. Terry avait juste, sa mémoire avait parfaitement fonctionné. Il fit encore un pas et puis, rapide comme l'éclair, il décocha un fulgurant direct à l'inopportun personnage. Le type s'écroula, telle une masse morte, la jeune femme sursauta, tandis que son compagnon, dans un mouvement de réflexe automatique, s'était redressé d'une traite.

- «Sert donc un double cocktail maison à ces jeunes gens!» lança Terry à l'adresse du Barman et en désignant le couple de vacanciers. Puis il se pencha vers le type affalé dans le sable qui se tenait l'œil droit de ses deux mains par dessus.

- «Dans quelques jours ça passera à la couleur sépia, tu verras, comme ça fait nettement plus joli!» lui dit-il au creux de l'oreille.

- «Tu connais cet emmerdeur?» questionna Frank en regardant s'éloigner en titubant le type, véritablement paniqué et affolé.

- «Autrefois, il s'appelait Flannery, mais c'était dans une autre vie!» plaisanta Terry en levant son verre à la santé des jeunes gens qui le remerciaient d'un geste similaire.

Les deux amis se mirent à rire, suivis du barman, qui lui ne savait pas pourquoi ses patrons s'amusaient autant.

FIN (à Anne-Michel, ma compagne adorée!)