(suite, seconde)
- «Je ne pouvais plus dormir mon cœur, pardonne-moi si je t'ai réveillé»
Terry prit place dans le canapé auprès d'elle, il lui releva les jambes et entreprit de le prodiguer un massage des mollets.
Ange avait des jambes superbes, bien galbées et si fermes qu'elles étaient presque trop dures et trop lourdes?
- «Regarde!» dit-elle soudain en montrant l'écran plasma au bas duquel défilait une banderole annonce.
Terry plissa les yeux encore gonflés de sommeil et lut: "Alerte à la bombe à l'aéroport, un paquet suspect a été découvert à 23h52 dans la consigne de l'aérogare qui a immédiatement été évacué. Les autorités ont exigé la suspension de tous les vols jusqu'à nouvel ordre ...".
- «Merde!» s'exclama Terry.
- «C'est bien notre veine» dit Ange, non sans un sourire aux lèvres.
- «Et merde, c'est pas vrai!» Terry s'était levé d'un bond, furieux comme un lion en cage.
- «Je ne crois pas que nous pourrons partir!» insista Ange.
Alors il avait pris son portable, étalé les billets d'avion sur la table basse et il avait appelé la centrale de l'aéroport pour avoir davantage de renseignements.
- «Je suis désolée, cher Monsieur, aucun avion ne décollera ce jour. Les services de déminage doivent s'assurer de la teneur du colis suspect et ensuite les enquêteurs devront faire leur boulot. Je vous suggère de vous rabattre sur le prochain départ pour Sharm El Sheikh, mardi prochain, je vous propose, d'ailleurs, en guise de compensation, une réduction ...» Terry raccrocha sans laisser l'employée poursuivre.
L'espace d'un instant l'homme sembla réfléchir, puis soudain, il arbora un sourire vainqueur.
- «Passe à la salle de bains mon amour, nous démarrons tout de suite!» et il l'avait soulevée par les aisselles; comme pour tenter de l'extraire du canapé. -‑ «T'aurais pas pris un peu de poids, toi, par hasard?» plaisanta-t-il distraitement en relâchant prise, ses efforts étant vains.
- «Mais, mon cœur, tu as vu, tu as entendu la téléphoniste, ça ne servira strictement à rien, nous ne pourrons pas prendre l'avion aujourd'hui!».
- «Laisse-moi faire, je passe un coup de fil à mon ami Frank et je te garantis qu'il va nous dégotter une place dans un vol en partance depuis l'aérogare Nord».
- «L'aérogare Nord? Mais c'est à deux heures de route!» pour la toute première fois depuis qu'il la connaissait, Terry put lire l'ennui et la contrariété sur le visage de Ange, mais l'homme ne releva pas le détail.
Il l'obligea à passer à la salle de bains en la poussant littéralement, tandis que de sa main libre, une main habile, il composa le numéro mémorisé de ce fameux Frank. "Pourvu qu'il soit de service!" se dit-il mentalement.
Ange s'était dévêtue, elle était entrée dans la douche, avait tourné le mitigeur d'un coup sec et, tandis que l'eau ruisselait partout sur elle, elle écouta attentivement Terry dans la pièce voisine.
Ange avait une ouïe ultra développée, hors du commun aurait-on pu dire sans exagéré, mais là d'où elle se trouvait, le vacarme de la douche en plus, elle ne pouvait distinguer que quelques bribes de la conversation.
Terry avait finalement pu joindre son ami Frank, qui comme présumé, travaillait effectivement cette nuit-là au centre de sécurité de l'aérogare Nord qu'il dirigeait depuis une dizaine d'années d'une main de maître, et grâce aux relations haut-placées de celui-ci, Terry avait pu convenir d'un arrangement privilégié exceptionnel.
L'homme avait ensuite rejoint Ange dans la salle de bains où elle se séchait les cheveux.
- «C'est arrangé mon amour, tu veux bien boucler les bagages, j'en ai juste pour quelques minutes, ensuite nous fichons le camp d'ici!», à son tour, il était entré précipitamment dans la douche, d'un geste automatique il avait poussé le mitigeur et puis, il avait soudain eu le souffle coupé. L'eau était glaciale! EN suffocant, il cria - «Comment peux-tu supporter une eau aussi froide!?!» il recula contre la paroi pour échapper au jet d'eau et régler le mitigeur sur une température plus adaptée.
- «J'en avais besoin ... pour me réveiller complètement» lança Ange, prise de court.
...
Exceptionnellement, Terry roula très vite. Leur timing était très serré et ils ne pouvaient absolument pas se permettre d'arriver en retard. Tout le long du trajet, Ange resta muette bien que ses yeux étaient animés de mouvements intenses qui trahissaient une vive activité cérébrale.
- «Nous y sommes, une équipe de Frank devrait, en principe, nous prendre en charge et s'occuper de la voiture» lança Terry en cherchant des yeux l'un ou l'autre individu qui aurait pu lui adresser un signe.
Et, effectivement, comme convenu, un homme en uniforme qui avait sans doute identifié l'immatriculation de leur véhicule, les stoppa à l'entrée de l'aérogare. Il était accompagné d'un bagagiste et d'un voiturier. Déjà, des dizaines de vacanciers et autres voyageurs allaient et venaient aux abords de l'édifice pris d'assaut.
- «Dépêchez-vous, il vous reste à peine 25 minutes avant le décollage!» leur avait signifié l'agent de sécurité.
Soudain, Ange eut un sursaut, comme si subitement elle avait reçu un message de son cerveau jusque là en léthargie. - «Faut que je passe aux toilette en vitesse mon amour, je ferai très vite».
Ce n'était pas le moment, les minutes s'égrainaient inexorablement, mais Terry consentit à l'attendre, à proximité de 'entrée des toilettes pour dames. Au même instant, une petite femme, d'un âge incertain, l'air anodin, mais apparemment pressée, s'excusa en le bousculant légèrement et entra à son tour dans les toilettes. Au passage, Terry remarqua son sac en bandoulière mal fermé d'où dépassé une espèce d'enveloppe brune qu'on ne pouvait pas ne pas voir du fait de sa taille disproportionnée.
18 minutes. Le temps pressait réellement.
- «Ange, ne traîne plus, il est presque l'heure!» lança-t-il en tambourinant à la porte des toilette sans l'ouvrir par savoir-vivre et décence.
La porte s'ouvrit immédiatement, Ange en ressortit, rayonnante et souriante comme il avait appris à la connaître et à se la représenter.
- «Ca va mieux toi, ça me fait plaisir de te retrouver de bonne humeur!» dit-il en la prenant par la main et en l'entraînant vers le portail.
Ange déposa son bagage à main sur le tapis roulant qui l'emporta vers le sas à rayons X et puis elle passa sous le porche du détecteur de métaux.
La lampe rouge se mit à tournoyer.
- «Veuillez vider vos poches, retirer ceinture et bijoux ainsi que tous les métaux que vous transportez» ordonna le préposé.
- «Je n'ai ni bijou ni objet métallique sur moi cher Monsieur, mais ...»
- «Veuillez, dans ce cas, repasser dans le détecteur, je vous prie!» la coupa le vigile.
La lampe rouge se mit à nouveau en branle.
L'homme pris sa "raquette" - une espèce d'appareil manuel qui permettait de cartographier toutes les parties du corps humain sans jamais le toucher et d'y détecter la présence éventuelle d'objets métalliques -. Une sirène stridente s'amorça.
- «Je suis désolé, je vais vous demander de nous suivre!» dicta le gardien que deux de ses collègues avaient rejoint aussitôt.
- «Permettez que je récupère mon bagage à main, je vais tout vous expliquer de A à Z monsieur l'agent» dit cordialement Ange.
A l'arrière, Terry paniquait, il ne savait plus que faire pour échapper à cette situation désastreuse et résoudre ce malentendu. Avec succès, il passa le portail.
Ange disparut dans une petite pièce adjacente, une dame en uniforme y apporta le bagage à main réclamé et Terry la suivit jusqu'à la porte du local de sécurité où un vigile de faction le pria d'attendre.
Tout alla très vite. Ange ressortit moins d'une minute plus tard de la loge.
- «Veuillez accepter nos excuses mademoiselle» lança le responsable confus.
- «Il n'y a pas de mal, vous faites votre travail» rétorqua Ange. Cette fois, ce fut elle qui entraîna Terry par la main, avant même qu'il eut le temps de poser la moindre question. Ils se mirent à courir. - «Moins de dix minutes mon cœur, il faut nous dépêcher» souffla-t-elle.
- «Mademoiselle Watts!?!» une voix s'éleva derrière eux.
Ils s'arrêtèrent net.
- «Mademoiselle Watts, votre dossier médical!» une grosse dame essoufflée tendit l'enveloppe à Ange.
- «Sans vos attestations, vous risquez d'autres problèmes à l'atterrissage» expira péniblement la femme.
- «Oups, pardon, je vous remercie» et Ange entraîna de nouveau Terry à toute vitesse vers la porte d'embarquement, prenant soin simultanément de remiser le dossier dans son sac. Les haut-parleurs lancèrent le denier appel aux passagers.
Ils franchirent sans encombre le contrôle des billets, suivirent le labyrinthe des passerelles et, une fous que l'hôtesse leur eut indiqué leurs places, ils purent s'installer dans l'avion.
Moins d'une minute plus tard, les portes furent refermées.
- «Pas trop nerveuse?» s'inquiéta Terry.
- «Cela ira t'inquiète, le plus dur est passé» Ange se leva pour enfermer son bagage à mains dans la soute prévue à cet effet.
Cette enveloppe ... celle-là ou une autre, Terry en avait vue une récemment, mais où était-ce déjà? Une étrange sensation de "déjà vu" le fit sourciller.
L'avion décolla.
- «Qu'est-ce que c'est que ce dossier médical que tu trimbales avec toi?» lâcha l'homme finalement.
- «Mes radios»
- «Tes radios?»
- «Mes radiographies, celles de mon accident. Un accident de la circulation, bénin tout compte fait. Le tibia, le coude et la tempe. On m'a recollée avec des briches et des plaques. Alors, tu comprends, pour passer le sas de détection d'un aéroport, je dois montrer patte blanche et donc toujours exhiber mon dossier médical!».
C'était donc ça! Tout bête. Suffisait d'y penser. Terry embrassa Ange en guise d'excuse, ce faisant, il l'ausculta du regard. Aucune trace ...
- «En tout cas, belle chirurgie mon amour, j'y vois aucune lésion!» dit-il.
- «Microchirurgie esthétique mon cœur, j'ai eu la chance d'être prise en charge par de grands professeurs. Si tu regardes bien à la racine de mes cheveux, près de mon oreille, tu peux voir un repli, c'est là qu'on a introduit la plaque dans ma tête».
Terry observa de plus près. Nada! Il ne voyait aucun replis, aucune cicatrice ni quoique ce soit si ce n'était une peau impeccable, inodore et parfaite. Mais il n'était pas un spécialiste en la matière et il acquiesça d'un signe de la tête en direction de Ange.
Leurs vacances à Sharm El Scheik furent mémorables. Un climat de rêve, un hôtel somptueux, l'accueil édifiant et la nourriture succulente!
La veille de leur retour, tandis que Ange profitait du soleil de plombs qui semblait épargner sa peau - à l'inverse de celle de Terry qui était devenu un accro de la "biafine" - l'homme se décida à passer un appel à Frank pour le remercier. Ce merveilleux séjour, c'était un peu à Frank qu'ils le devaient tous les deux.
- «Ah, Terry, alors, et ces vacances? Tout va bien?»
- «Génial Frank, encore une fois, nous voulions te remercier de tout cœur!»
- Ce n'était pas grand chose voyons! Au fait, ta copine, là, c'est la dame de fer version 2019?!?» plaisanta l'homme en ligne.
- «Pardon? Je ne comprends pas ce que tu insinues?»
- «C'est dingue, en 30 ans de carrière, mon collègue de la sécurité qui a regardé ses radios n'avait encore jamais vu autant de broches et de plaques métalliques dans un corps humain. C'est à croire que la superbe créature que tu accompagnes partout a été recollée de toute pièce!».
Abasourdi, Terry ne put répondre de suite. Ce ne fut pas tellement les propos ridicule de son ami Frank qui l'avaient dérangé, mais plutôt le ton employé. Ca avait été comme une insulte, comme une offense. Pourquoi les gens s'amusaient-ils sans cesse à toujours exagérer les faits?!?
La communication - sans raison apparente - fut coupée quand Terry sortit de ses pensées furtives. Par dessus son épaule, Ange semblait l'épier.
- «Tu me caches quelque chose mon cœur, à qui téléphonais-tu?» elle lui sourit de toutes ses dents blanches.
- «Frank. J'étais en ligne avec Frank, mais nous avons été coupés»
- «La distance et le réseau, c'est sans doute cela!», pour le distraire, elle se mit à lui enduire la nuque de crème solaire, là où le soleil l'avait cruellement brûlé.
- «Tu sais, le gars de la sécurité, il a dit à Frank qu'il n'avait encore jamais vu pareilles radiographies quand il a eu examiné les tiennes», Terry examina Ange, cette fois il en était persuadé, elle lui cachait quelque chose.
- «Il a sans doute exagéré, une broche dans le bras, une autre dans le tibia et une plaquette métallique dans le pariétal n'ont rien de rare ni d'exceptionnel Ca ne fait tout de même pas de moi une attraction de cirque!». Elle lui tendit la main. - «Tu viens te baigner? Je te prends sur un cent mètres» le défia-t-elle.
Terry plongea derrière Ange. La fille parcourut la première longueur, soit 50 mètres, sans refaire surface, gagnant à chaque brasse quelques centimètres sur Terry qui tentait vainement de la rattraper, lorsqu'elle toucha le rebord pour faire demi-tour, elle se précipita dans les bras de l'homme pour l'embrasser et l'embrasser encore.
Ce furent de vraiment belles vacances.
Ils étaient heureux.
Flannery fit pivoter vers la gauche la petite trappe, une espèce d'œilleton par lequel il avait une vue d'ensemble dans l'isoloir.
L'isoloir, c'était ainsi que l'on avait baptisé la chambre où l'on gardait Terry Grant.
Et Grant était toujours là, couché. On avait fait savoir à Flannery que la veille on lui avait ôté la tenaille de sécurité qui lui emprisonnait les pouces, son état ayant été jugé satisfaisant et donc qu'une certaine prudence était recommandée.
Flannery sourit, les yeux dans le vague, les sourcils vacillant de nervosité, un rictus sadique sur les lèvres.
Flannery n'était pas un vigile professionnel, il avait été engagé un an plus tôt pour le MYFP dans le futur cadre d'un gigantesque projet médiatique, tout d'abord en tant qu'homme à tout faire, ensuite comme portier et puis il avait incorporé dans l'équipe de surveillance pour les tâches de routine. Ici, son job de nuit consistait à vérifier su tout était en ordre avec le gars - Terry Grant - que l'on avait mis à l'écart dans l'isoloir.
Flannery n'avait posé aucune question car c'était une des trois règles d'or de la société:
- ne pas poser de question
- ne rien divulguer
- tout entendre, tout voir et ensuite tout oublier.
Flannery avait entendu ce Grant appeler une femme, la première nuit qu'il avait passée à le tenir à l'œil, ce taré de Grant avait ressassé son prénom huit heure d'affilée: ANGE, ANGE, ANGE ! à croire que l'imbécile ne savait dire que cela.
Alors, Flannery avait cogité. Qui était cette fille que réclamait l'autre? Pourquoi le retenait-on ici dans de telles conditions? Qu'est-ce que ce gars-là avait à voir avec la MYFP? Pas question d'interroger ses collègues - une des trois règles d'or: ne pas poser de question! Alors Flannery avait réfléchi et surtout, il avait cherché.
Bien que stupide, Flannery était un malin. C'était un ignoble salaud saugrenu, sans scrupule ni envergure qui croyait fermement en sa supériorité sur les autres et qui aimait par dessus tout se délecter du malheur des autres.
La veille, tandis qu'il s'était volontairement écarté du parcours habituel de sa ronde, il avait exploré une aile du bâtiment qu'il n'avait encore jamais visitée, et par chance, les portes qu'il rencontra n'étaient pas munies du système haute sécurité, ainsi, son "pass" limité lui suffit à atteindre le long couloir qui se terminait en cul-de-sac sur la double porte du labo.
Comme il faisait demi-tour, soudain il stoppa net sa marche nonchalante. Dans sa tête, il relut le panneau placardé sur la double porte: LABORATOIRE - INTERDICTION D'ENTRER - PROJET A.N.G.E.
"ANGE?", "Projet ANGE?" se répéta-t-il mentalement. Alors, mû par son instinct de prédateur bestial, il avait poussé brutalement la porte battante et était entré.
Il s'agissait d'une gigantesque antichambre, une sorte de long couloir avec sur la gauche de longues pièces aux portes verrouillées et aux vitres martelées ou opaques. Cà et là, certaines pièces à l'éclairage minimum renfermaient des animaux - Flannery reconnut parfaitement les jappements d'un chien qui se plaignait - et puis plus loin, là où une lumière blafarde scintillait en permanence, il put distinguer au-travers la vitre recouverte d'un vieux film opaque - une espèce d'autocollant appliqué sur une face pour empêcher que l'on puisse voir à l'intérieur - l'ombre découpée d'un corps d'une blancheur blafarde allongé sur un une table.
Trois petits coups d'ongle suffirent pour entamer davantage l'usure du film opaque. Flannery, le nez collé à la vitre, épia l'intérieur. Une salle d'opération lui semblait-il. Un tas de machines dont seules quelques-unes paraissaient fonctionner - des ordinateurs pour la majorité, des écrans, des appareils de mesures savantes, des instruments de contrôle et de diagnostiques ainsi que d'autres machines étranges - encadraient une sorte de table en aluminium sur laquelle reposait le corps inerte d'une jeune femme. Flannery, d'emblée, comprit qu'il s'agissait de cette fameuse Ange. Il mâta la poitrine aguichante tournée vers les néons en mode veille et, bien qu'aucun détail précis n'était correctement visible l'homme put constater qu'une ouverture, de forme rectangulaire - avait été pratiquée au niveau de l'abdomen de la jeune femme. La peau avait été méthodiquement et symétriquement découpée et retirée avec précision, faisant songer à un portefeuille ouvert. Sans doute, songea-t-il, avait-on pratiqué une autopsie de la défunte. Puis, en plissant les yeux, il put voir sur une tablette adjacente à la table d'opération un bras. Le bras gauche de la fille avait été sectionné et posé - comme abandonné - sur une table à roulettes juste à côté.
En y regardant encore plus attentivement, Flannery put encore deviner qu'une profonde incision, similaire à celle pratiquée au niveau du ventre, avait été opérée à hauteur du crâne, de sorte que la malheureuse avait été partiellement scalpée, par morceaux, les chairs et des cheveux de la fille avaient été comme retirés vers l'arrière et pendouillaient de côté comme si plus tard on avait eu l'intention de refermer et recoudre le tout.
Elle était là cette fameuse Ange, partiellement disséquée.
Alors, dans un élan de machiavélisme sans nom, Flannery sortit son portable et entrepris de prendre quelques clichés du cadavre dans ce piteux état. "Rien de tels, se dit-il, pour raviver les souvenirs de ce fou de Grant!". Déjà, cet obsédé de Flannery jubilait à l'idée de contempler la réaction de l'homme lorsqu'il lui exhiberait les photos de sa regrettée Ange!
Flannery s'était donc assuré que tout était en ordre dans l'isoloir et puis, via l'œilleton, il avait appelé ce Terry Grant.
- «Grant?»
- «Grant, il est l'heure de te lever mon grand ...»
- «Gran-ant?»
L'homme sur la couchette, toujours sous les effets des anesthésiants, finit par remuer, émergeant d'une profonde somnolence.
- «Lève-toi l'ami, j'ai ici quelque chose qui risque de t'intéresser» Flannery avait posé son portable dans la niche de la trappe et il avait tapoté le grillage de sécurité avec l'écran de l'appareil.
Terry avait finalement ouvert les yeux. La lumière qui provenait de l'œilleton, bien que diffuse, l'aveuglait. Il était resté plusieurs jours cagoulé et avait grand peine à distinguer quoi que ce soit. Que lui voulait-on encore?
- «Tu veux toujours des nouvelles de Ange l'ami, alors bouge-toi le cul et viens donc voir ce que je t'ai apporté!».
Ange? Le gardien avait parlé d'elle ou avait-il rêvé? Ange? Qu'avait-il dit au juste?
- «Je t'ai apporté des photos mec, tu veux les voir ou pas?» Fallenry avait prit une voix fluette et un ton chantant qui trahissait sa moquerie et ses mauvaises intentions.
- «Co ... comment va-t-elle, vous avez pu la voir?» balbutia Terry en tâchant de se relever, encore tout engourdi.
- «Bah, disons que ... vu comme ça, tu vas avoir quelques difficultés à recoller les morceaux mon gaillard!», Flannery avait pressé le bouton de l'écran de son portable pour l'éclairer et eut du mal à contenir son envie soudaine d'éclater de rire.
Terry s'approcha de la trappe de visite. De là où il se tenait, il ne pouvait voir qu'un nez et une paire d'yeux sournois à demi dissimulés par un képi, le tout illuminé faiblement, sans doute par une petite ampoule.
Soudain la lumière disparut et une bouche fétide édentée remplaça le nez et les yeux dans la trappe.
- «Qui est cette femme, Ange, par rapport à toi Grant?» interrogea Flannery d'un ton autoritaire. Il avait collé ses lèvres au grillage afin que ce Grant le comprenne bien et qu'il ne soit pas obligé de se répéter.
- «C'est ma femme ... enfin, ma compagne, ... je ne sais plus. Vous avez de ses nouvelles, je vous en prie, dites-moi!».
- «Qu'est-ce qui s'est passé entre vous deux Grant? Une dispute qui a mal tourné?», Flannery supposait qu'il avait bien dû se produire quelque chose vu qu'on maintenait ce Grant sous haute surveillance et qu'on avait autopsié sa compagne.
- «Non! Non pas du tout! - Terry bégayait -un matin, quant était-ce déjà? Mardi, mercredi passé, je me suis réveillé à ses côtés, elle ne bougeait plus. Les secours sont arrivés, on l'a embarquée, ils m'ont emmené et ... s'il vous plaît Monsieur, je vous en prie, vous pouvez m'aider? Dites-moi, je vous en supplie, elle va bien au moins?»
- «Pour être franc, cher Monsieur Grant, savoir si cette fille-là va bien était plutôt de votre ressort, c'était vous qui couchiez avec elle, pas moi, hélas! Quant à avoir de ses nouvelles, tout ce que j'ai, ce sont quelques clichés de mauvaise qualité pris avec mon portable bas de gamme».
Flannery ne put s'empêcher d'arborer un large sourire sordide. Il avait simultanément activé l'écran, sélectionné le fichier mémoire photos et avait affiché la première prise de vue qu'il avait capturée.
- «Remarquez, pour faire joli, j'ai sélectionné le mode Sépia» dit-il ironiquement en plaçant le portable dans l'interstice de la trappe ouverte, contre le grillage de sécurité.
Terry avait regardé.
La photo, aux couleurs passées, anciennes et jaunâtres, était floue et décentrée. Elle ne laissait pas voir grand chose. Terry plissa les yeux, il lui sembla repérer une paire de jambes, ou plutôt un corps étendu, mais sans plus de précision.
- «J'avoue que la première n'est pas une réussite; attendez, je vous en montre une seconde», comme Terry ne semblait pas réagir, Flannery avait poussé un bouton et l'écran était passé à la prise de vue suivante.
Terry sentit un nœud se former tout au fond de sa gorge. Cette fois ce salopard de gardien était en train de lui exhiber une photo de nu. µA y regarder de plus près, Terry put effectivement repérer quelque chose comme une poitrine de femme.
Mais...
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Style : Nouvelle | Par tehel | Voir tous ses textes | Visite : 705
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pseudo : bibiche.g
fait vite pour la suite,c'est vraiment beau
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