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Un espoir naissant par Allissacarthage

Un espoir naissant

La solitude est l’opium de l’enfant.

Il est une vérité reconnue que l’enfant plus que l’adulte n’est pas disposé à vivre seul, il n’en a pas les capacités. Et moi plus qu’un autre, je me sentais désespérément seule au sein de ce duo parental qu’étaient mon père et ma mère.

Non pas qu’ils ne se préoccupaient pas de moi ; ils étaient à la fois présent pour moi, savaient me distraire et m’amuser mais savaient aussi me laisser ces moments de solitude dont l’enfant était sensé avoir besoin. Et moi, je haïssais ces moments là, ces moments où, me retrouvant seule, je me retrouvais face à moi-même. Et que pouvais-je bien faire, que pouvais-je bien inventer pour ne pas tomber dans cet extrême ennui, cette oisiveté qui me guettaient dès que mes parents me tournaient le dos ?

Certains diront que l’enfant, ne manquant jamais d’imagination, savait toujours comment passer son temps libre, s’inventant des jeux que lui seul pouvait comprendre et des amis que lui seul pouvait voir et entendre.

Quelle atroce invention que l’ami imaginaire ! J’en eu des tas, un Rodolphe, une Anastasia, et même un César, mais pas un ne sut réellement me satisfaire et me tenir compagnie comme je le désirais ardemment.

Mais un jour, j’eus une idée glorieuse, une idée salvatrice qui pourrait enfin changer le cours de mon existence ; je décidais d’avoir un animal de compagnie, un chien, fidèle et affectueux. Qui mieux qu’un chien  pourrait me guérir de cette maladie solitaire ? Il saurait être là, à mes côté, partager mes moments de joie puérile, de bonheur intense mais aussi, m’accompagner dans cette période où les  doutes et les angoisses existentielles me marquaient cruellement.

J’allais donc plaider ma cause auprès de la direction, mes parents ne sauraient être aussi insensibles pour me refuser cette faveur, moi leur enfant chéri et unique.

C’est avec cette confiance inébranlable qu’un soir, je fis part de ma requête.

Je ne laissais rien au hasard, chambre et devoirs avaient été faits et vérifiés et je pris soin d’adopter sur mon visage un voile grave et tragique, Phèdre elle-même n’aurait pu mieux faire.

J’exposais ainsi mon cas, je m’y étais préparé, je n’oubliais rien, la nécessité essentielle d’avoir un compagnon de jeu, la bonté qu’ils auraient de lui offrir un toit et celle de satisfaire ma demande, je jouais bien sûr de la flatterie, les adultes y sont tant sensibles avais-je appris.

Je me sentais éloquente, tel un ténor du barreau, je voyais ma cause entendue et reçue.

Ainsi, toujours confiante, j’attendais la sentence, le verdict tomber.

Et là, ô désillusion intense, je ne pouvais y croire...la triste réalité m’accablait d’un refus sans nom.

Les arguments ne tardèrent pas à fuser ; qui s’en occuperait, que ferons-nous de lui lors des prochaines vacances ? Comment ne pas penser à maman et à son allergie et enfin, un chien ne saurait être heureux et épanoui dans un appartement.

Mais moi alors, le serais-je jamais, heureuse et épanouie dans cette vie d’enfant incomprise et solitaire ?

Dans un dernier élan de courage, j’osais à peine quémander un animal plus petit, une tortue, un poisson rouge,  pensant qu’en diminuant la taille, j’augmenterais peut-être mes chances d’accéder à la prospérité.

En vain.

Alors, les larmes coulant sur mes joues, je me sentis faible et vaincue, pensant désormais aux longues années de solitude qui m’attendaient, faisant de moi un être triste et fade.

Voyant ma détresse, ma mère me prit sur ses genoux, m’essuya mon visage mouillé par la rosée de mon chagrin et me dit dans l’oreille, à l’abri de l’ouïe de mon père :

« Rassures toi mon enfant, bientôt, nous serons quatre ».

 

 

 

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Style : Nouvelle | Par Allissacarthage | Voir tous ses textes | Visite : 780

Coup de cœur : 12 / Technique : 10

Commentaires :

pseudo : ciloum

charmant

pseudo : alnilam

un beau texte qui parle vrai de la solitude des enfants uniques.