Là-bas, un peu plus au froid existe une fille. Qui souffre. Souffrir est peut-être trop fort, mais elle endure sa vie. Elle l'endure parce qu'elle a toujours été seule. Elle est devenue une fille toute seule, elle devenue une femme toute seule, elle est même devenue mère toute seule, elle deviendra sans doute chef d'entreprise toute seule. Elle est tellement toute seule qu'elle ne supporte pas qu'on la découvre, qu'on la dévoile et pourtant c'est un trésor qu'il faudrait ouvrir au monde entier.
J'aimerais la prendre dans mes bras et la serrer tout doucement contre moi pour qu'elle sente une présence. Pas ma présence, ce truc informe fait de l'imbrication d'un homme et d'une réflexion, non, une présence. L'existence d'une vie, un peu comme celle de son fils, mais plus adulte, plus égale à elle-même. Ce ne serait pas de l'amour, ni même de l'amitié, ce ne serait pas une gibecière d'émotions ni même de sensations, surtout pas, ce serait simplement de l'étant, du vivant. Une existence qui serait capable de la regarder sans jamais la juger, une existence qui lui répondrait sans la comparer, une existence qui lui renverrait ce doute pernicieux de la solitude en l'ouvrant un peu, une existence avec laquelle elle pourrait dialoguer sans avoir l'impression de se donner ou pire, d'être volée ou violée. Parce que de ce possible là, de cette capacité à accepter de n'être pas seule, du chemin nécessaire à faire pour vivre avec les autres et non plus malgré les autres, ou contre les autres, de ce regard nouveau jaillit toujours la lumière.
Et cette existence qu'elle sentirait près d'elle serait en permanence le pas qu'elle ferait vers son bonheur, vers des amours choisies, vers une vie dans laquelle depuis toujours sa place attend qu'elle l'occupe enfin.
Cette présence ne serait pas ma présence, ce serait simplement sa vie qui bouge, ce serait elle qui symboliquement rendrait vivant un monde qui l'aimerait et qu'elle aimerait, un monde où elle ne serait plus seule.
J'aimerais qu'elle sente sa présence.
Mais elle s'est perdue dans la brume de ses mensonges, petite lumière vacillante, traînant derrière elle le fardeau de la mort qui la nourrit, se griffant au mépris qu'elle inflige, se lacérant aux mots qu'elle n'arrive plus à dire, encore moins à écrire : « bonjour, comment vas-tu, je vais assez bien, je pense parfois à toi, pas toujours en bien »
Quelle tristesse !
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Style : autre | Par obsidienne | Voir tous ses textes | Visite : 699
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Commentaires :
pseudo : monalisa
OBSIDIENNE RAVIE DE TE REVOIR. TU NOUS A MANQUÉ. TU REVIENS AVEC UN TEXTE TRÈS FORT ET PLEIN DE "J'AIMERAIS LUI DIRE" QUI INTERPELLE AVEC UNE TENDRESSE ET UN AMOUR PUISSANT DE RESPECT ENVERS L'AUTRE. MERCI DE CE MAGNIFIQUE ÉCRIT.
pseudo : ficelle
tu ferais bien de lui dire tout ceci, cela fait du bien à entendre. Merci pour elle.
pseudo : VIVAL33
Encore une fois, un très beau texte. Un baume, j'imagine, pour les âmes qui sont en souffrance
pseudo : Brestine
Un beau texte. Elle mériterait de lire tous ces mots, comme toutes ces solitudes qui se mentent parfois et qui croient, seulement, être véritablement seules; l'être humain est bien complexe...
pseudo : Blanche Plume
Qu'il est difficile de ne pas être seule lorsque l'on n'en a pas envie...ou peut-être que si... En fait, qu'il est difficile de ne point s'aimer... Je suis très heureuse de te revoir parmi nous !
pseudo : evasion
ce texte m'a enormément félicitations
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