Le jour de sa naissance, il a poussé son premier souffle. Sans ouvrir encore les yeux, il a pleuré. Entouré de formes nébuleuses, il distinguait mal ces créatures brumeuses, la présence de ces apparences étrangéres le pétrifiait l'agitait. Le froid du monde extérieur accentuait son appréhension, ses cris voulaient tout dire... Il refusait la vie comme s'il craignait déjà la mort... Sinon, pourquoi toutes ces larmes ?
La vie allait sûrement l'engloutir après l'avoir bien fait souffrir. Avant même d'y séjourner, son désir fut se s'enfuir le jour même de sa délivrance. Il voulait rester dans le ventre de sa mère où il nageait dans le bonheur d'un amour maternel empreint d'une affection éternelle. Les personnes autour de lui débordaient de joie de réjouissance. De cette naissance tant attendue, ils fêtaient la vie et la prospérité. Tour à tour, ils l'embrassaient pour goûter à la pureté et à l'innocence, lui sentait leurs bouches le maculaient, le souiller... Il se débattait dans son berceau pleurant jusqu'à l'épuisement, personne ne comprenait son anxiété, chacun avançait une supposition... Il y avait ceux qui pensaient que la faim le tordait, d'autres que la soif le triturait... Les "peut-être" allaient bon train, jusqu'à ce qu'un sommeil réparateur le met entre les bras de Morphée et l'arrache à ce brouhaha infernal.
Au deuxième jour de sa naissance, il se prépare à affronter tous les risques et les dangers, il pressent dès lors tous les malheurs édifiés, même si la voix fluette de sa mère est là pour le rassurer. Une stupeur incontrôlée s'empare de lui... Au plus profond de son âme, une voix poignante lui dit:
- « Tu vas vivre fourvoyé, tel un atome désorienté, tu vivras au milieu d'humains sarcastyiques au milieu d'une hypocrisie incroyable, ils joueront de ta sensibilité et ils te feront goûter leur infamies. »
Tout en lui donnant un avant goût de la vie, cette voix alarmante se voulait en même temps prévenante, elle rétorqua à cette petite créature frêle et angélique: « ne te tourmente pas petit ange, avec le temps tu apprendras à te fondre dans la foule, tu survivras à cet univers comme tous les autres avant toi, tu vivras des bons moments et tu en oubliras les mauvais... La vie va t'engloutir et tu n'auras pas le temps de t'arrêter, tu seras happé par le tourbillon de la vie. Aujourd'hui, face à l'inconnu, à l'inexploré, tu gémis, tu pleures... Alors que ta famille célèbre ta naissance, sèche tes larmes, petit, le jour de la revanche viendra inéluctablement, le jour où apres une longue vie heureuse et parfois tumultueuse, tu découvriras les signes de la mort sur tes tempes blanchies, ce jour-là tu diras: « Enfin, je cesse de m'acharner, d'analyser de condamner, les prémices de la fin d'un destin sont arrivés alors je vais me reposer, me vider et me décharger de tous les tourments acculés la mort est venue me délivrer des accrocs de la vie, elle m'enveloppe d'un voile de paix et de quiétude, ceux qui à ma naissance ont chanté, dansé, je les entends crier, pleurer et s'endeuiller. »

Cet enfant qui naît avec cette crainte de vivre, et ce vieux qui quitte cette terre avec le sourire aux lévres ne sont-ils pas la preuve que la vie et la mort ne font qu'un ? que vivre c'est souffrir et mourir c'est se fondre dans la nature ? qu'entre le début et sa fin, il n'y a qu'un petit instant de la vie éternelle ?