Autant vous le dire d’entrée : vous êtes cocu. Nous le sommes tous ! ou nous avons l’impression de l’être... Trompés par nos représentants élus, par nos institutions, par une politique ne correspondant plus à nos aspirations. Cocus et pas forcément contents !

Pourtant... comme il était douillet, notre nid démocratique, comme on y était « à l’aise dans nos charentaises », comme on appréciait son confort, sa convivialité, sa douceur. On a fini par s’y endormir. Et les coucous sont venus. « C’est la fin des idéologies ! » chantent-ils du matin au soir et sur tous les tons, accompagnés par la sempiternelle chorale des individualistes et des imbéciles réunis. Une précision, toutefois : « la fin des idéologies », pour eux, les coucous, cela signifie la fin des idéologies qui prétendent (quelle prétention !) s’opposer à la toute-puissance de leur propre idéologie.

La loi du plus fort, du plus riche, du plus maffieux, du plus salaud, du plus con ! Le libéralisme, en un mot, voilà le dieu (la pensée) unique et inique qu’ils veulent nous voir adorer. Comment dans ce contexte, préparer l’épanouissement d’un espace démocratique qu’ils réduiraient comme peau de chagrin si on les abandonnait à leurs instincts productivistes et mégalomaniaques ? Comment résister ? Comment survivre ? Comment retourner la situation ? Sans doute pas en leur volant bêtement dans les plumes ni en nous battant bec et ongles pour des alternatives collectivistes qui partout ont échoué dans le sang et la privation de liberté. On peut en revanche, accepter de couver les oeufs des coucous... si on veille à sauvegarder les nôtres.

Et quand les oisillons briseront leurs coquilles, nous assisterons à un drôle de spectacle ! À droite, la progéniture des coucous et son duvet grisâtre comme le libéralisme économique ; à gauche, nos petits à nous, arborant fièrement le plumage encore un peu court mais déjà bien coloré d’un nouveau libéralisme. Politique, social et culturel. 

Encore un petit effort, donnons généreusement la becquée à toute la nichée... avant de lui apprendre à voler de ses propres ailes. Nous constaterons alors - sans grande surprise - que notre descendance, portée par l’espoir et l’amour des grands espaces, plane naturellement au-dessus du nid, très haut dans ce ciel clair dont les coucous ne peuvent percevoir l’infinie profondeur. Le libéralisme transformé, transcendé... mué en valeur de gauche, pour rien au monde, les anciens cocus de la Démocratie, ne voudraient rater ça ! 

Alors, pour en finir avec le cocuage, nous devrions, me semble-t-il, apprivoiser les coucous. Voilà qui exige, je ne vous le cache pas, courage et abnégation. Du temps aussi... de la modestie... de l’imagination surtout... et un peu d’organisation.