L'autre matin, je regardais dehors, et je voyais mon jardin dans un manteau de coton: de la brume, du bon brouillard comme il y en a de temps en temps dans ma région. Cela sentait bon l'automne.
Comme souvent le matin, je vais au travail pour 8h. Je monte dans ma voiture, légérement attristé par cette grisaille qui gomme tous les détails du décor de ma ville.
Je ne suis entouré que d'ombres. Déjà que j'ai les yeux embrumés au quotidien...
Les objets deviennent inintéressants, comme sans vie, informes comme s'ils avaient perdus leur âme.
Je suis dans ma voiture, veillant à ce qui se passe autour de moi. J'ai la radio allumée car certaines ombres peuvent émettrent de mauvaises ondes.
Je passe un feu, puis un deuxième et le troisième. Aujourd'hui, ils sont à ce moment de trois couleurs: gris foncé, en bas, gris moyen au milieu et gris clair en haut. C'est à gris clair que l'on passe.
Je suis maintenant sur l'autoroute et je redouble de prudence devant ces ombres qui m'agressent de tous les côtés à la fois. Il y a des dangers que j'ai appris à éviter.
Je roule donc, disais-je plus haut, je roule sur l'autoroute qui me mène à mon univers professionnel des jours de brouillard, vers ce grand batiment qui ressemble à un gros rectangle, posé sur un plateau calcaire, posé au milieu de nulle part.
Je roule, dis-je, encore plus loin, et je me rends compte que, progressivement, les formes reviennent à la vie: elles perdent leur grisaille, les arbres redeviennent arbres et les voitures moins agressives.
Soudain, un disque blanc apparait devant moi, au dessus du ruban d'asphalte. "C'est amusant comme le soleil peut être blanc par moment", me dis-je, "on peut même le fixer dans les yeux. Attends, attends encore un peu. Je le sais, je le sens."
Et enfin, j'émerge de ce brouillard qui m'accompagnait jusque là. Je prends dans les yeux le ciel bleu et sa luminosité qui annoncent une merveilleuse journée. Il fait beau et mon coeur s'éclaircit.
Je souris toujours quand j'arrive sur ce plateau calcaire en quittant le brouillard, car j'arrive au dessus d'une mer de brume qui s'offre à mes yeux. J'ai envie d'y plonger.
Et je ris encore plus quand je me dis que sous cette mer de brume, il est toute une ville qui ne verra pas le soleil avant plusieurs heures et qui doit pester contre cette grisaille qui gomme tous les détails de leur décor.
Je suis heureux.
Vécu il y a plusieurs jours.
Pensé depuis.
Ecrit le 11 septembre 2008.
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Style : autre | Par volatile | Voir tous ses textes | Visite : 888
Coup de cœur : 13 / Technique : 12
Commentaires :
pseudo : obsidienne
belle métaphore des rencontres quotidiennes que l'on peut faire, presque par obligation, sauf qu'on n'a jamais envie de replonger dans la grisaille...
pseudo : ficelle
tu me dirais que tu vis dans ma ville...et je ne serais même pas étonnée, tant tu décris ce que je connais si bien. C'est très très beau, bien, super, merveilleux, parfait...enfin, j'aime. Merci à toi Volatile.
pseudo : Isalou
Superbe ! Un texte qui donne à réfléchir et qui fait relativiser beaucoup de choses... Un tout grand merci, Volatile !
pseudo : misa
Un écrit si doux et raffiner, qu'on parcours ton autoroute avec toi.
pseudo : volatile
Un grand merci à vous. Obsidienne, la lumière est nécessairement au bout de la grisaille, il le faut, tu nous l'a montré aussi. Ficelle, peu importe la ville et la route que l'on a devant soi, le bonheur est universel. Isalou, relativiser est un peu comme la sagesse, cela vient avec l'âge. Et depuis quelques temps, je relativise. Misa, tes textes et ta présence sont lumineux comme un matin de ciel bleu.
pseudo : monalisa
UN MATIN DE SEPTEMBRE EST UNE PORTION DE QUOTIDIEN QUE L'ON PARTAGE AVEC SON "MOI" QUI NOUS SUIT DANS CETTE GRISAILLE ILLUSOIRE D'UN BEAU TEMPS A L'HORIZON. MERCI DE CE PETIT INSTANT NOSTALGIQUE D'UN GRAND MOMENT.
pseudo : VIVAL33
Très beau texte volatile. La luminosité, la chaleur, la clarté qui triomphe de la morosité...
pseudo : volatile
Merci mona, merci vival, avec vous la grisaille est éphémère.
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