Ce texte n'est pas autobiographique.

La solitude?

Certains vous diront qu'il n'y a rien de mieux que de se retrouver seul, Seul au Monde, Seul, complètement SEUL ou...du moins...en compagnie de Soi-même.

 L'occasion vous disent-ils de se remettre en question, de se questionner, de tenter de SE connaître...

 Je faisais partie de ceux-là avant d'arriver à Bordeaux et de me rendre compte qu'il est possible d'être plus seul que seul.

 Une solitude poignante, transperçante, qui vous attrape, vous serre la gorge jusqu'à l'étouffement et vous secoue, vous secoue et vous secoue encore et ENCORE, jusqu'à ce que Néant s'en suive.

 Elle vous vide de votre Substance, de votre Humanité et vous laisse comme mort, comme Inexistant.

 Elle vous rend fantomatique, transparent, inconnu à vous-même, PITOYABLEMENT chétif, dépourvu de toute matière.

 Et pour cause, vous prenez conscience que dans un monde en proie à la globalisation, vous n'êtes RIEN ou tout du moins, VOUS incarnez au mieux le Vide individuel.

 L'individu n'a de valeur que s'il est associé à un autre individu ou mieux à un groupe d'individus: le Couple ou la Société.

 Vous vous sentez exclu, vous vous sentez reclus, VOUS VOUS SENTEZ TRAQUÉ PAR VOS DÉMONS INTÉRIEURS.

 Vos organes vitaux entrent en décomposition et vous n'êtes plus que l'ombre de vous-même.

 La solitude...ou le suicide forcé?

 Vous êtes désespérément en quête d'un Ami, d'une Présence, d'une Odeur, d'un Toucher, d'une Voix ou d'un Regard qui puisse vous resubstantialiser, vous donner à NOUVEAU Corps, vous RAMENER à la Vie.

 Mais...

 Vous restez désespérément SEUL.

 Vos nuits sont longues, vos journées sont interminables et votre haine grandit inexorablement pour tous ceux qui EUX ont la chance de ne pas vous accompagner dans ces méandres que vous connaissez si bien...maintenant!

 Et pourtant...

 PARADOXE! 

 Quand on est accompagné...TROP accompagné, SUR-accompagné, on cherche à être seul, à se couper du monde, à se soustraire au monde...

 On cherche à être Seul, on recherche cette quiétude légendaire, cette tranquilité mythique réputée pouvoir apaiser les plus violentes tempêtes.

 Solip-sisme ou l'art d'être accompagné par Soi-même?

 Ne dit-on pas avec une conviction déconcertante qu' "il vaut mieux être seul que mal accompagné"?

 Ceux qui le disent sont d'ailleurs à bien y regarder ceux qui sont justement ACCOMPAGNÉS et qui n'ont donc par conséquent presque JAMAIS rendez-vous avec EUX-MÊMES...avec leur Conscience personnelle...

 Au lieu de vous rassurer, ils vous exaspèrent et des envies de meurtre vous viennent tout à coup...

 Un jour...

 Un jour viendra...

 Un jour viendra où...

 Un jour viendra où ils comprendront que dans ces moments là ON SE FOUT ou presque de toutes ces considérations, de tous ces clivages pseudo-rassurants qui séparent les bonnes des mauvaises fréquentations...RIEN n'est tout Blanc, rien n'est tout Noir...

Manichéïsme puéril!

Esthétiquement social...

...et mentalement dérangé: ainsi se résume mon "moi", ainsi s'articule t-il, ainsi vit-il et ainsi disparaîtra t-il...

Je ne demande pourtant pas grand chose...

...une main dans la mienne...

...une épaule où poser ma lourde tête...

...un regard où plonger le mien, en détresse...

Je ne demande qu'à être rassuré, qu'à masquer cette Vérité qui vous déchire et vous malmène tant que vous êtes en proie à vous-même...

Parle-moi!

Ecoute-moi!

Touche-moi!

Aime-moi? (il parait que l'amour ne supporte pas l'impératif...)

C'est tout ce que je te demande.

Sois-là pour moi et je serai là pour toi.

On dit souvent que la vie à Deux est souvent plus belle ou du moins moins moche: ça dépend si l'on considère plutôt le verre à moitié plein que le verre à moitié vide...si l'on est de nature plutôt Optimiste que Pessimiste...

La vie avec soi-même est CRUELLE, elle est tellement Vraie et en relation directe avec la Réalité qu'elle effraie les plus courageux, les plus vaillants et le plus croyants d'entre nous.

Tout cela vient surement de la pureté de sa lucidité.

Quoi qu'on fasse, on sera TOUJOURS seul, même dans notre Destin collectif: MOURIR!

A peine nés sommes-nous déjà condamnés à mourir.

Nous ne disposons dans ce monde que d'un passeport à durée limitée...très limitée et pis...

...cette durée fait partie des innombrables inconnues (x, y, z...) placées dès la première seconde, dès notre premier souffle...sur notre chemin.

VIVRE POUR MOURIR: quelle ABSURDITE!

Quelle CON-NERIE!

La vie est Absurde et l'Homme l'est a fortiori lui AUSSI.

Malgré le caractère éphémère et futile de la chose, je ne peux m'empêcher d'envier, de jalouser l'illusion et l'insouciance que semble procurer la version Collective de la Vie: la vie à Deux ou plus...

Pas le temps de penser!

Du moins...pas le temps d'approfondir la réflexion et d'entrer dans les profondeurs fétides de l'absurdité humaine.

Rire pour ne pas PENSER...rire pour ne pas MOURIR...

Mais...

Rire SEUL, est-ce bien raisonnable? N'est-ce pas plus absurde que l'Absurde lui-même?

Il a fallu que je foule de mes pieds naïfs le sol hexagonal; là où tout est si Gris et Froid, pour prendre conscience de tout cela.

Comme si le Soleil, la Mer, une Mère, un Père, un Frère, et quelques Cocotiers empêchaient à la Réalité de me sauter aux yeux, de me sauter au cou ou tout du moins s'appliquaient à la travestir et à la rendre plus avenante, plus chaleureuse...plus...

SIGNIFIANTE!

Il est vrai que devant tant de beauté et de familiarité, on a du mal à imaginer ce qui se cache vicieusement derrière: l'INCONNU, l'IMPOSSIBLE, l'ENFER!

Un mirage permanent qui vous rend la vie plus belle, qui rend le sourire facile et le rire...naturel: la légendaire joie de vivre des Antilles...

Dans l'Hexagone, point de tout cela...et tout de suite...CHANGEMENT!

Les mines sont tristes, les visages sont éteints, les corps sont froids, les teints sont ternes, les regards sont vides: de vrais cadavres ambulants ou mieux...pour coller davantage à la post-modernité, de vrais automates, sans BUT, sans MOTIVATION: métro (tram), boulot, dodo! Beurk! Quelle est cette affreuse mixture?

Ont-ils donc tous pris conscience qu'ils étaient en sursis, qu'ils n'étaient que des morts en PUISSANCE?

Pas si sûr!

Mais...ça ne va pas tarder!

Et certains même n'attendront pas le moment tant redouté, ils prendront les devants et se suicideront...dernier acte de bravoure, dernier cri inaudible: l'Absurde en ACTE!

Et pourtant, durant notre court passage sur Terre, il faut s'efforcer d'être heureux, il faut s'efforcer d'éviter au maximum les "aléas de la vie" pour donner un peu de Couleur à ce qui est si Noir, un peu de Joie à ce qui est si Triste, un peu de Sens à ce qui n'en a pas et n'en aura sans doute JAMAIS!

Mais...

Je suis un homme...

Et...

Par définition en proie à ma propre FINITUDE!

Je suis IMPARFAIT et FAIBLE!

La traduction de "faible" en langue espagnole en dit d'ailleurs long: "debil"!

Je suis "debil" et j'ai donc besoin de cette Illusion qui rendrait les choses tellement plus agréables, tellement plus vivables...

J'ai besoin d'un "toi". J'ai besoin d'un alter ego.

J'ai besoin de chaleur humaine, j'ai besoin de donner un Sens ultime et éphémère à ma Vie, pour oublier l'espace d'un Instant que bientôt ce sera...DÉJA...FI-NI...

Je suis un "Je" qui recherche un "Tu" pour former un "Nous".

Seras-tu ce "Tu"? Seras-tu cette lueur d'espoir?

Seras-tu ce faux-sens, ce non-sens tant espéré, tant désiré?