Ce jour est arrivé où nous nous rencontrons. Enfin! En fin?
J'ai envie de te prendre dans mes bras, j'ai envie de t'embrasser et de te serrer dans mes bras et je vois dans tes yeux le reflet de mes envies.
Mais avant, nous allons apprendre à parcourir la distance qui nous sépare, cette distance que nos respirations entendent et que nos bras peuvent toucher. D'abord prendre la mesure, les mesures, d'abord voir et savoir que cette bouche dit maintenant les mots que la main écrivait, que les yeux regarde bouger la tête qui pensait, que les oreilles entendent un corps avant immobile. D'abord exister dans l'expérience la plus minimale, être là ensemble, poser nos mains, relâcher nos muscles et retrouver un rythme plus sûr pour nos cœurs. D'abord sentir tout ce qui émanait des écrits et qui est le fruit de nos activités, sentir nos odeurs diffuses, sentir les mouvements de l'air qui nous évite et nous rapproche, nous mettant à la même température.
Sentir une présence différente faite d'une autre gêne, une gêne qui partage l'espace en deux, une gêne qui intercale les répliques, une gêne qui additionne deux mondes. D'abord se dire en silence que nous sommes là, que nous sommes deux êtres différents, que nous avons deux histoires différentes, que nous avons un même désir de vivre, un même désir d'être libre, un même désir d'être entier.

Je ne vais pas te le dire, mais je veux te montrer que je te regarde comme tu es et surtout pas comme je voudrais que tu sois, ignorant que je suis de ta richesse, que je regarde ton corps comme je regarde le mien en sachant que je suis imparfait. Je vais écouter ta parole en sachant que tu l'as construite comme j'ai pu le faire, avec en plus un combat que je n'ai pas eu à mener contre des lâches, contre l'inégalité qui t'a été proposée comme normale, contre l'agression permanente du monde qui veut que tu sois belle et consommable, en plus d'être corvéable.
Je veux que tu saches que tu n'auras rien à me prouver. Je veux que ton seul effort soit de devenir celle que tu veux être. Ce sera ma seule exigence, si tu l'acceptes.

Sentir que la distance se réduit, étoffée par des mots que nous comprenons différemment, mais qui nous permettent d'en trouver d'autres, épaissie par des émotions qui naissent dans nos entrailles et que nous avons l'impression de partager alors que nous les vivons seulement en même temps, colorée par nos regard humides, diluée par des mouvements imperceptibles et chargés de notre respect.
Un thé, ou plutôt un café ?
Un premier geste du quotidien, qui ne casse rien de cet échafaudage déjà solide, qui installe tout ce que nous ne nous sommes pas dit et qui va nous offrir du temps.
Nous sommes très près l'un de l'autre, nous allons nous embrasser et laisser éclater dans notre baiser ce soleil qui éclaire déjà notre histoire.
Ce jour est arrivé ou nous allons commencer à nous rencontrer. Enfin? En faim!