Rouge comme le vin qui, à flots submergeants, inonda l’abîme sans fond de mes tourments. Il n’y avait d’espoir que dans le dérisoire, d’avenir que dans le pire. J’étais un peintre aveugle qui peignait en coups saccadés la nature morte de mes illusions perdues. Le rouge se répandit sur la toile virginale tel un cancer dans une chair traumatisée. Et l’ivresse rimait avec ma détresse en une effervescence de désolation.
Rouge comme le feu qui naquit de mes mains dans l’allégresse du martyr. Puisque la possible s’était métamorphosé en irréalisable, je n’avais d’horizon que l’éclat blême d’un horizon crépusculaire. Je voulais en finir, je voulais que cela se fît dans un panache de lumières pour mieux illustrer les ténèbres qui avaient envahi mon cœur. Les flammes léchèrent ma peau dans une suavité infernale. Et de moi ne demeura que le flambeau aux morts.
Rouge comme le sang qui s’échappa de mes veines embrasées, telle une cascade de souffrances se jetant dans une vallée de regrets. Seul dans la blancheur de cette chambre d’hôpital, je ne voyais le grand jour qu’à travers le prisme vicieux de la morphine. Une goutte, puis encore une autre. Indicibles fragrances d’un oubli éphémère. J’étais un fétu de paille jeté aux quatre vents violents, un misérable grain de poussière jeté sur le marbre de mon anéantissement. Une boule de souffrance.
Rouge ; bleu et jaune.
Rage, Ravage, Râle ; Béquille, Beauté, Jouissance.
Bleu comme l’océan de mes yeux où se tarissent les eaux opaques de mes tourments. Peu à peu, pousse la fleur de la miséricorde sur la prairie fertile du « pourquoi pas ». Un premier pas, puis un autre, une promenade dans le bois du réconfort. Revivre commence par des larmes sèches dont l’évaporation transforme en volutes évanescentes les souffrances de jadis. Le possible se distille dans le lac moiré de l’espoir.
Bleu comme un ciel d’été à l’aurore naissante. Les cauchemars se dissipent dans la fragrance poétique du songe, et s’exhalent les couleurs du futur. Les cris se font gazouillis légers, le silence des absents se déguise de fanfreluches chamarrées, la noirceur du tunnel resplendit d’une aura inédite, l’opalescence de la chambre d’hôpital arbore soudain l’arc-en-ciel enivrant d’un doux lendemain. Alors que le Phoenix vient au monde, c’est un univers entier qui, en une grâce subtile, se dilate dans le prisme de l’infini.
Jaune comme le soleil à son zénith qui caresse la Terre d’une main aimante. Dans le tourbillon de mes terreurs, j’avais cru qu’il n’y aurait de futur que dans le proche abysse de la mort. Et pourtant, l’une après l’autre, les trente-quatre bougies qui ornent mon gâteau d’anniversaire cessent leur clameur infernale et laissent se dégager la brume veloutée de l’envie mêlée au désir. L’envie est source de vie, le désir est un suave soupir. L’une dans l’autre ils forment un tao existentiel, l’essence même du renouveau. Mon renouveau. Et j’avance pas à pas vers mon avenir en ayant pour horizon les éclats scintillants du bonheur.
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Commentaires :
pseudo : féfée
J'ai adoré !!! Sublime, touchant, et attachant. Un grand merci, et CDC !
pseudo : Mignardise 974
WAOUH ! CDC !!!
pseudo : lutece
J'irais bien y faire un tour dans "le bois du réconfort"! tu semble y avoir trouvé une certaine sérénité! Merci pour ce superbe texte! CDC
pseudo : damona morrigan
La voilà ta renaissance et en couleur ! Merci pour ce magnifique texte et CDC
pseudo : w
Merci de m'avoir lu. Ce texte illustre cette immense vague de bien-être qui submerge mes affres du passé. Je vous embrasse tous les quatre très fort.
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