Il est 7h30, l'heure des lèves-tôt. Je m'étire tel un chat hors de mon lit avec la marque de l'oreiller au coin du visage, les yeux aussi perdus que dans le noir. Un café, ou deux, ou trois m'aident à soulager mon envie de fumer. Je dois arrêter : fumer tue. C'est ce qu'ils racontent à la télé et sur tous les paquets de cigarettes. Je prends le métro, c'est rempli à craquer, les odeurs nauséabonds des parfums mélangés à une chaleur intense me donnent la gerbe. Les gens sont silencieux, ils se regardent, comme pour s'attaquer au moindre coup bas. J'ai croisé un regard différent, il était doux, il se posait délicatement sur moi comme pour me faire coucou, mais il s'est envolé à la station suivante. Je marche dans les rues, trainant sous ma chaussure droite un bout de chewing- gum égaré. Il fait beau ce matin, je suppose, je n'ai pas observé le ciel. Mais les rues semblent paisibles, loin des sirènes et dealers de la nuit. Je suis en retard. Je finis par arriver devant un bâtiment abîmé par le temps, couleurs tristes, des grilles pour nous tenir en otage. Des étudiants, tout comme moi, attendent l'ouverture des portes, la petite mise en scène du directeur pour pouvoir entrer et commencer le calvaire qui fera de nous des esclaves de la société, -c'est pour notre bien, parait-il-, il est presque obligé d'hurler pour se faire entendre, quelques uns prennent la peine d'écouter le ramassis de conneries qu'il a à dire, d'autres préfèrent écouter leur morceau préféré ou envoyer des sms, et la plupart discutent des potins et de blablas inintéressants sur leur vie. Il est 9h15 et j'ai déjà mal à la tête.
17h. La journée m'est passée dessus comme un train en pleine vitesse, je n'ai retenu aucun nom, aucune porte, aucun visage. Je m'en fiche. Je rentre chez moi avec des cernes sous les yeux, la tête comme une mongole fière, mais je souris au peu de soleil que cette ville a à m'offrir. Je sors une clope, l'allume, inhale profondément ; tant pis pour mes poumons et mon cancer à 45 ans ; la toux, les dents jaunes et les doigts qui puent : j'en avais besoin. Je devrais faire le même trajet à l'envers, à l'endroit, tous les jours pendant dix mois, à compter les vacances de quinze jours. Je cours au suicide, une année qui recommence, j'ai envie de dire « fait chier » mais ce serait impoli face à vous : Des inconnus. Je suis aussi comme vous...
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Style : autre | Par supertramp | Voir tous ses textes | Visite : 668
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Commentaires :
pseudo : lutece
...Ben on est comme toi, pris dans une prison même si ce n'est plus celle sinistre d'un "bahut" et suis comme toi "accro" à la clope...mais bah, tant pis! CDC pour ton texte si vivant!
pseudo : damona morrigan
Dix mois c'est rien... après si on peut appeler cela de la chance ce sera pour toujours ! Alors dis toi qu'être étudiante ce n'est pas aussi dramatique que cela ! C'est maintenant que tu décides de "qui tu veux être" c'est à toi de te poser la question ! CDC
pseudo : supertramp
Oui, nous avons de la chance. Cette "prison" nous protège énormément du monde réel, mais ce n'est qu'une fois dehors que l'on s'en rend compte. Qu'une fois trop tard..
pseudo : w
MA relation avec le tabac est conflictuelle, un peu comme si j'avais une maîtresse perverse que je ne voudrais pas revoir mais qui me manquerais viscéralement. C'est une lutte au quotidien où je ressors frarement vainqueur.
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