à Guy de Maupassant.
Le métro aérien. En contrebas l’espace dégagé, déprimant de la trouée ferroviaire qui vient croiser sa ligne, et où affluent les ternes faisceaux de rails à l'éclat mat. Le paysage ingrat, tout en ballast et lignes, murs aux falaises abruptes, parfaitement sans couleur ( n'étaient les tags trop drus qui s'étalent sur leur croûte), ponts de métal gris figés; stérilité, grimace.
Et au fond, l'horizon, nu, à peine bombé.
Et puis encore, les nuages. Tiens, surtout, les nuages. Massés au fond du ciel. Relégués au lointain. Juste à ras d’horizon. Accrochant mon regard. J’ignore pourquoi, au juste .
Mais non, voilà, ça y est ! Je sais.
Ces nuages vivent.
Je les fixe, au point que mes yeux bondissent hors de moi, de ma face, comme pour les atteindre, les rejoindre.
Non, certes, pas de démenti ; je ne me suis guère trompée ; les nuages respirent. Je les vois faire, je les vois pulser doucement ainsi que feraient des ventres alourdis de salamandres. De salamandres, ouais, d’accord…mais de salamandres monstrueuses !
Car ils sont monstrueux.
C'est bien le mot qui convient.
Je continue de les scruter. Ils m’arrachent les mirettes.
Enormes, oblongs, sournois.
Indifférents. Couchés.
Batraciens. Nénuphars. Crocodiles à fleur d’eau.
Ils croupissent. Musculeux. Chargés et ambigus.
Soudain immensément lestés d’une menace latente.
Et voilà-t-il pas que je me mets à avoir peur.
Une angoisse que je n’avais pas vu venir. Mais qui ne s'en est pas moins bel et bien coulée en moi, sans que j’y prenne garde.
Une angoisse qui me laisse comme vidée de tout contenu, décapée jusqu’à n’être plus qu’un puits de vide autour duquel tente péniblement de se remodeler , de se réorganiser un dérisoire, un petit tas de chairs glacées, inertes.
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Style : Nouvelle | Par Patricia Laranco | Voir tous ses textes | Visite : 468
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