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Coup de gueule, coup de plume par ifrit

Coup de gueule, coup de plume

Des années durant, je l'ai faite dure, sans merci ni pitié. Il fallait mener des hommes, charger leurs cœurs de force et de courage, rassurer leurs femmes et leurs amis. Il fallait être un chef pour ces guerriers sans loi, leur apprendre l'honneur et la justice, manier leurs corps comme un seul, comme le mien. Le respecter.

Des années durant, je l'ai faite aimante, passionnelle et protectrice à la fois. A ma femme j'offrais la tendresse du monde, et par devers moi je repoussais les infamies de l'univers tout entier. Ma voix lui faisait honneur, et ma dulcinée me le rendait au mieux. Tendre vers la perfection, mépriser jusqu'à l'homme pour n'en garder que le meilleur. Dans ma voix, j'étais le meilleur à ses yeux.

Des années durant, je l'ai faite chaude et réconfortante. Parer l'amitié de lauriers vainqueurs, ensemble tout serait possible, pourvu qu'on se tienne les coudes. Je la relevais d'un ton vif et ferme, lorsque ses jambes ne la portaient plus, et nous repartions toujours. J'avais espéré le retour, qui jamais ne vint.

Puis je mélangeais tout. Dans mes paroles, mes amis devenaient des guerriers, ma femme était une amie, et mes amies se voyaient devenir mes femmes. Un vent de révolte souffla cet alambic cornu, et je m'aperçus de toute la valeur qu'ils donnaient aux mots. Dans le même temps, je perdais mes amis, ma femme et presque toutes mes amies.

Mais pas mes guerriers. Pas d'autres mots que la force et l'honneur pour eux. De l'amour pour leurs femmes, du courage pour leurs amis et une lettre à leur famille. Je n'ai d'ailleurs jamais écrit la mienne. Je crois qu'elle pourrait se trouver ici, dans tous ces mots. Ces mots que j'écris pour dessiner mes actes. Mes actes qui m'ont donné la valeur d'un homme, mes actes qui m'ont ouvert les yeux sur la valeur du monde, mes actes par lesquels je suis jugé ! Mes actes !

Et me voici jugé pour ces paroles ! Minauderies, niaiseries sans nom, quelle bêtise ! Oubliées les tapes dans le dos, les embrassades, les larmes et les soirées ! Décimés les moments doux, les tableaux à quatre mains, les étés à la plage et le vin au frais ! On ne m'y reprendra plus à ouvrir ma grande bouche de grand imbécile, naïf que je suis de croire que les actes s'inscrivent dans le marbre.

Lorsque viendra la grande guerre, lorsque le fer tintera contre les boucliers, brisera les os et tranchera la chair, lorsque les cris et le sang couleront vers la Terre, je serai là, comme avant. Mais je vous toiserai comme vous m'avez toisé, et par vos actes je vous jugerai. Je m'entourerai de guerriers, d'hommes d'honneur, de femmes de valeur, et ensemble nous referons le monde, comme avant.

En attendant, souffrez de mon silence et craignez vos prochaines années ! Il n'y a rien que j'oublie, rien que je pardonne. Juste le son de la vie et la valeur de l'Homme.

 

 

 

PS : au vu du barouf qui se trame en ce moment sur mytexte, je souhaite préciser que ce texte n'y est lié en rien.

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Style : Pensée | Par ifrit | Voir tous ses textes | Visite : 717

Coup de cœur : 15 / Technique : 14

Commentaires :

pseudo : Iloa

C'est tellement émouvant. Tu es doté d'une si grande intelligence ! Merci simplement pour l'émotion. CDC ! et technique...ÉVIDEMMENT !

pseudo : féfée

Un texte très fort ! CDC

pseudo : Mignardise 974

CDC !

pseudo : w

Un prose qui explose à mes yeux en un style d'écriture très joli. Je te félicite de nous avoir fait partager ce petit bijou. CDC et Tech.

pseudo : BAMBE

Quel brio! quel cri! quel talent! ... CDC

pseudo : cendre de lune

Sous la lune d'argent, dans mon royaume de la nuit, les jugements n'existent pas. Il y a les paroles, les actes, point. Et, la fontaine du pardon n'est pas seule, dans mon jardin, il y en a bien d'autres encore. L'une, m'a parlé de toi et m'a montré ta grandeur d'âme. J'ai encore pleuré mais cette fois de joie.

pseudo : malone

je l'attends ce moment... tu ne saurais à quel point... peut-être pas pour les mêmes raizons... dans tout les cas, quel bonheur de lire IFRIT... tu m'enrichis vieux, craché, juré!...

pseudo : ifrit

Merci malone, c'est vraiment très gentil ! Mon texte "La chanson" est sûrement le seul qui ressortira de l'intimité de ma rencontre avec Cendre de Lune. Mais d'autres écrits viendront, en espérant qu'ils seront tout aussi enrichissants pour vous comme pour d'autres ! Merci encore !