Et si ma vie durais le temps d’une cigarette?
Le temps de quelques taffes que je pense savourer,
Un plaisir d’une minute où je pourrais m’essouffler
Et je craque ma dernière allumette,
Une vie qu’on consomme sans le temps de s’retourner,
Une vie qui se consume sans le temps d’y penser,
Consommatrice avertie qui s’assume pas,
Dépendante de sensations que j’conçois pas,
J’aspire mes rêves, je souffle des ronds,
J’attends la grève qui fera taire ce trop d’agitation,
Ma clope qui part en fumée,
Comme une proposition de s’abandonner,
Epais brouillard qui m’pique les yeux,
Un voile qui cache nos entre deux,
A ce cache-cache dévastateur,
Je me fait lâche, j’ai bien trop peur,
Le souffle court qui asphyxie,
L’emprise de trop qui m’affaibli,
Ma bouche en cœur qui en redemande,
J’attends ma dose comme une offrande,
Et si ma vie durais le temps d’une cigarette?
Le temps d’une danse insensée juste pour s’accoutumer,
Un privilège criminel privé d’arrière pensées,
Et je craque ma dernière allumette,
La vie s’accroche dans une absurdité,
Un instinct de survie impossible à réprimer,
Et mon corps est assiégé par cette dépendance,
Assoiffé, quémandeur d’une forme d’accoutumance,
Les mégots qui s’écrasent sur cette matière trop dure,
Comme s’écrasent ma vie trop fort contre des murs,
L’accessoire accessible qui se réduit en cendre,
Et de cette machination je ne veux me défendre,
La béquille vacillante qui se fait trop précieuse,
Comme un appel à l’aide, une réponse aguicheuse,
L’amie silencieuse qui accompagne mes spleens,
Le geste mécanique, complice clandestine,
La substance ironique qui m’fait passer le temps,
Je me fous de vos avertissements, de vos foutus slogans,
Le cancer nous guette tous, nos âmes sont atrophiées,
Liberté de penser, liberté de rêver contrôlées,
Et si ma vie durais le temps d’une cigarette?
Je craque ma dernière allumette.