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Divagations par kev

Divagations

Je cherche encore moi-même la portée de ce massacre littéraire. Si vous la trouvez, je vous prierai de bien vouloir m'en avertir :) Boris eut tant aimé aspirer de la boue à la paille à la mode hongroise pour vivifier son esprit corrompu comme le faisaient bon nombre de ces congénères depuis longtemps embrigadés par les messages subliminaux des publicités d'agences de voyage bon marché. Hélas, de guerre lasse, il n'était parvenu qu'à rogner frénétiquement les extrémités cartilagineuses de son faciès vrillé. Ainsi, on le comparait volontiers à une truelle défraîchie ou encore une montgolfière trop lestée qui s'en irait se perdre vers le néant, précipitant ses passagers dans un désert brumeux. Les interprétations allaient bon train quant aux multiples déformations faciales et corporelles qu'il arborait avec une volonté chaque jour accrue. La locomotive crachait inlassablement des nuages de fumée pourpre, signalant son départ imminent. Allait-elle dérailler cette fois ? Il se le demandait, tout en se coinçant malencontreusement le majeur de la main gauche dans la pince de crabe qui lui servait de porte-clé, cadeau de sa défunte tante Philomène, celle qui exhalait si fort le pâté et la naphtaline. Boris embarqua, en piétinant par mégarde une vieille dame en train de ramasser son sandwich aux rillettes. Tout en cherchant une place en marchant à reculons, il songea qu'il emballerait peut-être son visage dans du papier mâché si le train venait à quitter son rail. La fois précédente, il avait mordu violemment dans ce qu'il croyait être l'accoudoir de son siège, mais n'était autre que le bras dodu d'un fermier chauve déguisé en arlequin. Cela n'avait étrangement pas empêché la catastrophe. Le train déraillait toujours au même endroit, au niveau d'un nid d'hippopotames angoras. Il regarda par la fenêtre ; un jeune bambin s'amusait à escalader la paroi du véhicule harnaché à une corde à sauter. Boris referma évasivement la fenêtre au moment ou l'enfant voulut s'y agripper, ce qui le fit chuter. Un homme informe à la face verdâtre assis deux sièges plus loin, amusé par ce qu'il venait de voir laissa éructer un rire huileux tout en tapant au sol de ses bottes cloutées. Boris se souvint en avalant ses trois chewing-gums au romarin qu'il n'avait pas pensé à emprunter à sa voisine corse son échantillonnage de décapsuleurs en résine importation Chili. Pas de potage ce soir, il se conterait de ronger des gravats pour avoir bonne haleine. Il se pencha, et, en craquant bruyamment ses culottes courtes au niveau de l'entrejambe, aperçut dans la cabine voisine un homme qui jouait des claquettes tout en buvant de la tisane, tandis que sa compagne, une dame énorme enrubannée de cellophane faisait un bain de coudes dans une auge remplie de sauce bolognaise. 32H67. Sa montre était encore probablement passée à la machine à laver, et il constata en larmes qu'elle suintait d'un mince filet de bétadine. A présent, l'homme décoloré s'amusait à avaler et régurgiter ensuite une collection de petits lamas en cire peints à la main. Boris eut une impression ravageuse. A l'heure ou sa thèse sur le rôle de l'arithmétique cantique dans la conservation sous vide du jambon de Bayonne en outre-Atlantique par les ménagères veuves atteintes de la rubéole entre 56 et 58 ans pour des raisons nosocomiales ou divinatoires peinait à voir le jour, sa petite amie Roberta sculptait des statuettes vaudou en granite en Cisjordanie avec son ancien moniteur de tir-à-l'arc reconverti dans l'acupuncture. Rien ne s'était passé comme il l'avait souhaité. Lui vivait seul avec sa grand-mère en décrépitude dans une chaume, et désespérait de parvenir un jour à l'étouffer avec une soupe aromatisée à la javel pure. Il avait déjà essayé avec du white spirit, mais la vieille l'avait bu comme du petit lait, et adopté la recette pour ses bains de bouche pré dinatoires. Le contrôleur qui passait en luge entre les cabines traversa violemment la vitre en perdant l'équilibre dans un virage et atterrit aux pieds de Boris qui sursauta et s'encastra la tête dans le porte-bagages au-dessus de lui. L'homme en uniforme semblait n'avoir qu'un doigt à chaque main et portait un monocle violet à l'envers noué à l'oreille gauche. Boris dégaina son billet qui avait trempé dans la margarine fondue au fond de sa sacoche en lierre tressé. Le contrôleur le saisit d'une main fébrile puis le lécha et se le colla sur le front, à côté d'un autocollant «Bravo le veau» et un post-it découpé en forme de sapin de noël sur lequel semblait inscrite une liste de courses en hébreu. Quant ce fut au tour du second passager de présenter son titre de transport, celui-ci se mit à vibrer de toutes part et à compresser son visage mou entre ses mains jusqu'à ce qu'il devienne écarlate. Il exécuta ensuite une série de mimes fort savantes devant le contrôleur qui le regardait d'un œil guilleret en confectionnant un pendentif avec des petits carrés de pelouse fraiche. Au moment où le singulier personnage commença à mimer ce que Boris identifia comme un poulpe asthmatique, une forte secousse se fit sentir et le train dérailla inexorablement. Il revint à lui quelques temps plus tard, mais il lui sembla que sa vue avait subitement cessé de fonctionner. En passant rapidement sa main dissoute sur ses yeux, il se rendit compte qu'une large tranche de bacon fondu l'empêchait de voir ; C'est alors qu'il fut témoin du tragique spectacle qui se déroulait autour de lui. Une masse de gens informes s'agitaient frénétiquement dans un irréel ballet de roulades aléatoires et saugrenues, s'entrechoquant les uns les autres avec un doux fracas retentissant contre les parois de la locomotive renversée. Miraculeusement, la chute de Boris avait été amortie par un gâteau aux tripes et au miel.

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