Elle m'a écrit, des mots touchants, une fille que je connais à peine, tout juste son surnom, attachant, chargé de sens, qui fleure bon le pain quotidien et l'obligation, le lien, le subterfuge aussi à son cœur défendant, une femme devrais-je dire mais je crois qu'elle aurait longtemps préféré qu'on l'aimât pour la fille qu'elle était, plutôt que pour l'enfant au genre trop incertain, pas assez masculin. Alors c'est une fille, qui répète au gré de ses amours ces ricochets d'attention, un regard qui se pose dans ses yeux mais qui n'est pas pour elle, une caresse qu'elle consomme avec son honnêteté définitive mais qui n'est pas une caresse.
Seule sa vie n'est pas un ricochet, à force d'être elle-même, elle est devenue femme.
Elle m'a écrit une envolée de fraîcheur douce, des compliments qui n'étaient pas flatteurs, seulement les signes que l'on s'entendait bien, que l'on se comprenait, mettant sur mes mots des émotions déjà vécues et sur mes silences des pudeurs enfouies. Et j'ai bu son message comme un bonheur rare, parce qu'il est l'allégorie de la communication des humains ; en peu de mots elle dit des choses vraies, des choses que l'on dit quand on prend le risque de se dévoiler, des choses que l'on pense d'abord pour être sûr de pouvoir les donner, c'est un message qui abolit le rapport de force habituel entre une femme et un homme, un message de respect, de connaissance, un message de reconnaissance.
Et puis cette femme m'a offert son prénom. C'est une belle personne et je suis content de faire partie du même monde qu'elle. Ses mots me disent que j'ai raison de vouloir connaître les autres, sinon comment nous serions-nous rencontrés ?
La vie est belle, je vais lui dire qu'elle y est pour beaucoup