Imritte se leva aussi et s’approcha du Tableau. Toute la peinture illuminait le grand couloir et les lumières jouaient sur les glaces. Dehors il faisait nuit, et tout était bleu, mais ici dans la maison les meubles, les murs et le sol étaient entièrement dorés par les épis de maïs qui s’agitaient lentement sur le Tableau. Valenta et Imritte étaient tout proches maintenant, les yeux fixés sur la toile vivante, pleine de merveilleuses promesses. Quel cadeau magnifique ! Les couleurs se reflétaient de plus en plus précisément dans les grands miroirs et les textures et les bruits de la nuit du Teroffle se fondirent pour de bon dans le paysage d’or du Tableau.

Les voilà dans le champ de maïs, les pieds bien enfoncés dans la terre craquelée d’un sol inconnu. Ils poussèrent un soupir d’allégresse en regardant autour d’eux : le champ s’étendait presque à l’infini sous leurs yeux ahuris. On voyait loin au Nord la silhouette d’immenses pics rocheux fracasser l’horizon en dents de scie. A l’Est s’extirpaient des épis de maïs les cimes d’arbres gigantesques, qui se balançaient au grès d’un hymne à peine perceptible.