Clotaire le Bienaymé

Clotaire le Bienaymé, ainsi qu'il aimait à se faire nommer, avait fait de sa pauvre existence de baladin errant un sentier d'insouciance et d'amusement...De chants galants en envolées lyriques, il amusait la Cour pour quelque bout de pain, couche auprès de l'âtre et protection suzeraine.

Un jour, il perdit tout pour les yeux de sa mie ; sa mie qui, de surcroît, ne l'était qu'à demi ! Il s'agissait, en fait, de la Dame des lieux, qui pour le pauvre bougre n'avait guère de vœu !

Il s'était mis en tête de charmer la belle, risquant le pilori et la question au sel... Il faut dire qu'Ysabeau, cette fausse pucelle, avait le verbe haut et la manière cruelle ! Elle  pris malin plaisir, auprès de son époux, d'accourir et lui dire, gonflée de son courroux : « Sachez, Mon bon ami, que votre hideux bouffon, ce gueux bête et teigneux, n'a que pour seule raison de me faire les doux yeux ! »

Son cœur était de pierre et, fière de sa victoire, elle vint châtier Clotaire, forte de son pouvoir.

Il lui fallu du temps pour d'elle se défaire, mais garda a jamais une rancune amère.

Et lorsqu'au jour béni Clotaire trouva sa mie, la Dame mi-sorcière s'étouffa de colère !

Il vint à son chevet, trouvant son agonie, et feignant l'empathie, l'œil brillant, lui dît :

« Madame, je vous plains ! Vous me voyez meurtri... Il n'est pire malin, que diable et jalousie !

La nature n'a su vous offrir ses largesses, vous ôtant sentiment et autre gentillesse ;

Elle ne m'a, pour ma part, offert que peu de choses, mais dans ces petits riens, l'amour à grande dose... »

Puis tournant les talons, il mit un point final, achevant en paroles le méchant animal :

« Ma mie n'est point de Cour, je ne suis gère vassal ; mais fort de son amour, me voilà votre égal ! »

Tous droits réservés par et texte de :    Blanche Plume