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La réception par tehel

La réception

LA RECEPTION,

Avertissement: prenez un double coussin et bloquez-le derrière votre nuque afin d’éviter tous maux de tête.

- Papa, on arrive bientôt ? répéta Lucy pour la millionième fois.

- Fous-nous un peu la paix, tu veux ? tu le verras quand on sera là ! enchaîna Debbie en vérifiant de nouveau sa tresse dans le miroir de fantaisie du pare-soleil.

Cousine Mary avait accouché au printemps et, à l’occasion du baptême de la petite Lysa, nous avions été invités à la réception.

- Et toi, tu ferais bien d’accélérer un peu, nous allons être en retard à l’église ! ajouta encore Debbie d’un ton courroucé.  Debbie était sur les nerfs, juste avant de partir, nous avions eu une discussion au sujet de son chemisier que je trouvais un peu trop transparent à mon goût...

- Je ne peux pas: les limitations de vitesse ! abrégeais-je.

- Lucy, ferme ce carreau, tu vas prendre froid !

- Voyons chérie, il fait 30° dehors !

- Oui Maman, j’ai chaud !

- Ferme ce carreau je te dis ! et toi, comment veux-tu qu’elle obéisse si tu dis tout le temps le contraire de ce je dis !

Je ne répondis pas, a chaque fois que nous partions quelque part, l’atmosphère s’électrisait toujours dangereusement !

- La porte ?

- Hein ?

- La porte, j’ai oublié de fermer la porte !

- Tu en es certaine ?

- Oui, enfin, je ne m’en souviens plus très bien !  Fais demi-tour, il faut vérifier !

Demi-tour ?  Debbie était folle !  Demi-tour, alors que nous étions à plus de 50 kilomètres de la maison !

- C’est moi qui l’ai fermée, je m’en rappelle maintenant !

- Toi ?

- Oui, souviens-toi, je suis sorti le dernier !

- C’est juste ?

- Si je te le dis ! mentis-je de mon air le plus innocent.

- Quand est-ce qu’on arrive ? récita Lucy.

- Bientôt ma chérie, bientôt !

- Tu as pris le sac sur la table ? lança Debbie d’un ton surpris comme si elle venait soudain de se réveiller.

- Le sac sur le table ?

- Oui, le cadeau !

- Tu ne m’as rien dit, moi je n’ai pas pris de sac !

- Ah si, je te l’ai dit, c’est pas possible, c’est toujours moi qui dois penser à tout, j’en ai marre ! s’emporta Debbie à juste titre.

- Maman ?

- Tu ne m’as rien demandé, je ne suis pas devin, je ne pouvais pas savoir !

- De quoi va-t-on avoir l’air maintenant, sans cadeau ?

- Qu’est-ce que j’y peux ?  hein ?

- Maman ?

- On donnera de l’argent ! improvisais-je.

- De l’argent ?  Pour un baptême ?

- Maman !

- Oui, de l’argent, ils iront chercher quelque chose pour la petite !

- Maman ! nous n’entendions jamais la petite Lucy lorsque nous discutions.

- Et le cadeau, qu’est-ce qu’on va en faire ?

- J’en sais rien, ça servira toujours bien pour quelqu’un d’autre !

- Maman !

- Quoi encore ?  Tu ne peux pas nous laisser tranquilles une seconde ?  Pour quelqu’un d’autre ?  Un cadre en étain avec Lysa gravé dessus ?

- Tant pis, on le leur donnera à une autre occasion !

- Maman !  Maman !

- Quoi ? dis-je sans réellement prendre attention.

- T’es incroyable toi, c’est toujours pareil avec toi !

- Le sac, c’est ça ? murmura Lucy en montrant le fameux sac en question, à ses pieds, juste derrière mon siège.

- Quoi ?  qu’est-ce tu dis ? Debbie avait entendu, mais moi pas !

- Ne t’énerve pas ainsi, on peut toujours leur expliquer et puis- soudain, je réalisai ce que Lucy venait de nous dire.

- Tu as le sac ?

- Oui Maman, c’est toi qui l’as mis là en partant !

Je jetai un coup d’oeil à Debbie qui s’entassa dans son siège, l’air confuse.  La discussion était close et pour une fois, j’avais obtenu gain de cause.

- On arrive bientôt ? demanda Lucy pour ne pas changer son répertoire.

- T’as faim toi ? lança Debbie pour faire diversion.

- Bah oui, quand même, je n’ai pas mangé ce midi !

- Ca, ça ne te fera pas de tort, tu es bien grossi de ces temps-ci !

C’était vrai, depuis quelques temps, je serrais mes ceintures quelques trous plus loin vers l’extrémité parce qu’un léger renflement, pareil à une petite bouée, débordait de mes pantalons, juste au niveau de mon nombril.

- Mon Papa, il est gros - e, mon Papa il est gros - e ! chantonna Lucy en se tortillant dans son siège, mon Papa il est gros - e !

- Si je suis gros, c’est de ta faute ! accusais-je honteusement Debbie qui se retourna vers moi en me mitraillant de ses yeux assassins.

- De quoi ?

- Ben oui, tu me gâtes de trop !

- T’as qu’à pas être aussi gourmand !

Elle avait raison !  J’ai toujours été un gourmand !  Un gourmand difficile, mais un gourmand quand même !

- Ca y est, on est là ! anticipais-je en apercevant le panneau indiquant la ville où habitait cousine Mary.

- Plus la peine de te presser, maintenant, c’est foutu pour l’église !

- J’y peux rien chérie, notre Opel se fait bien vieille !

- De toutes manières, à la vitesse où tu roules, tu ne risques pas d’attraper une crampe au mollet droit ! continua à râler Debbie.

- On y est Papa ?

- Oui ma chérie, encore 5 minutes.

- Je pourra jouer avec Lysa ? dit-elle encore assez maladroitement.

- Pourrai, ma chérie, on dit je pourrai ! la repris-je.

- C’est là ! hurla Debbie en manquant de nous faire verser dans le fossé alors que j’attaquais un virage délicat.

- Youppie ! enchaîna Lucy en me perforant les tympans !

Juste comme je stoppai la voiture, toute notre famille sortait de l’église.  Tout le monde était là, tout le monde semblait heureux, tout le monde arborait un sourire de réclame pour dentifrice, sauf la petite Lysa qu’on venait d’asperger d’eau bénite et moi-même, car j’aurais préférer ne pas y être.

Ce n’était pas que ces réunions de famille me dérangeaient, mais surtout parce que j’avais envisagé de piquer un petit roupillon dans mon bon vieux fauteuil, comme tous les dimanches après-midi.

- Ah enfin, vous êtes là, il ne manquait plus que vous, on pensait que vous ne viendriez pas ! lança cousine Mary en guise de bonjour.

- Oui, tu connais Ted, avec lui, le moindre trajet en voiture se transforme en expédition interminable ! lança Debbie non sans à nouveau me fusiller de son regard réprobateur.

Ce fut l’accolade générale.

- Bonjour !, ‘jour, ça va ? bonjour ! ça va ? tu ne me reconnais pas ?  Tu ne changes pas toi, hein ?  t’aurais pas un peu grossi ?  quelle nouvelle ? et patati et patata...  Baisers sonores, baisers claquants, baisers mouillés.  La douche buccale, empruntes de lèvres peinturlurées.

Il y a ceux qu’on connaît pas, mais qu’on embrasse quand même; il y a ceux qu’on a à peine vu deux ou trois fois, mais qu’on embrasse comme si ils venaient d’être libérés après une pénible prise d’otage; il y a ceux qu’on est pas sûr de connaître mais qu’on embrasse pour pas faire d’erreur; bref, on embrasse tout le monde, sauf le curé !

On n'a pas le temps de s’en remettre, pas le temps de souffler ou de se rincer, que déjà, en cortège, sous le regard attendri d’un curé sur le seuil de son église, on démarre en file indienne.  Direction la salle de réception.

Dans la voiture, les recommandations habituelles.

- Lucy, tu seras sage hein !

- Mmm !

- Et toi Ted, tu tâcheras de ne pas trop boire hein !

- Mais oui ma chérie, tu me connais !

- Justement !

Finalement, notre convoi s’arrêta sur le parking désert d’un établissement réservé pour la circonstance.

- Allez, tout le monde entre ! cria Alan, le mari de cousine Mary.

Et pareils à des enfants disciplinés, nous pénétrâmes dans la salle.

Horreur glaciale, ça puait les égouts !

Une insupportable odeur pestilentielle qui vous pinçait les narines et vous retournait les boyaux !

- T’as senti ? dis-je à l’oreille de Debbie.

- Ne commence pas tes réflexions déplacées hein !

Debbie n’avait rien senti !  C’était incroyable ! Cette fille, décidément, m’épaterait toujours !

La salle !

Une salle de fête.  Sur les murs, on pouvait encore voir les angelots blancs et les gros flocons de neige du dernier réveillon de Noël.  Plus loin, on avait essayé de peindre les personnages d’un célèbre dessin animé et tout au long de la corniche, on avait punaisé de magnifiques dalmatiens, qui, probablement irradiés par les effluves nauséabonds, étaient devenus verts...

Tout le monde prit place, chacun se mit là où il en avait envie.  Les tables, disposées en forme de U, étaient garnies du portrait enrubanné de la petite Lysa, où cette fois elle souriait de toutes ses dents qu’elle n’avait pas encore...  C’était mignon !

- Lucy ?  Où est Lucy ?

- Elle est là-bas, elle joue avec les autres gosses, laisse-la !

- Oui, mais pas dehors tout de même, pense aux voitures !

- Lucy, tu rentres !  Lucy, je ne te le dirai pas deux fois, tu rentres ! s’égosilla Debbie.

En attendant qu’elle récupère notre petit monstre, j’allai m’asseoir.

C’est incroyable comment les gens sont !  Dès qu’il y a à manger et à boire, tout le monde obéit à cette pulsion de fatigue soudaine qui dicte de poser ses fesses sur la chaise la plus proche !

- Pardon ! Pardon, excusez-moi !  Pardon, Pardon !  Pardon, excusez-moi !  Heu, pardon, vous ne voulez pas avancer un peu ?  Pardon !

Afin que je puisse atteindre l’unique espace de trois places libres que j’avais repéré, je dérangeai tous ceux qui s’étaient assis.

Ah voilà, j’y étais enfin !  D’un coup d’oeil discret, je vérifiai les couverts.  Ca allait, ils étaient propres.

- Chéri, tu m’aides ? Debbie, de l’autre côté de la table, me tendait notre Lucy qui pleurait comme une veuve parce qu’elle ne pouvait plus jouer dehors !

- Viens mon coeur !

- Nan !  J’veux rester avec maman !

- Mais il n’y a pas de place de ce côté là !

- C’est rien, elle restera sur mes genoux !

- Tu veux qu’on change de côté ?

- Non, surtout pas, t’as vu le tour que je dois faire ?

Oui, j’avais vu !  Surtout que de mon côté, les gens avaient l’air de s’étendre un maximum ! pensais-je sans rien ajouter.

On nous remercia d’être venus si nombreux et pour les cadeaux.

- Misère, le cadeau ?

- Quoi ?

- Je l’ai oublié dans la voiture !

- Ca va, je vais le chercher. Debbie me sourit.

- Pardon ! Pardon, excusez-moi !  Pardon, Pardon !  Pardon, excusez-moi !  Heu, pardon, vous ne voulez pas avancer un peu ?  Pardon !

Enfin l’air libre, l’air sain, l’air bon et respirable.  Ma voiture.  Ma voiture ?  Où était-elle ?  J’en savais plus rien, il y en avait tellement !  Une Opel, c’était pas difficile à repérer quand même !  Surtout la mienne, un vieux modèle avec une couche de crasse dessus…

Ah, la voilà, c’est juste, je m’étais garé sous le gros arbre afin de bénéficier de l’ombre.

J’embarquai le cadeau et pris une bonne bouffée d’air pur avant d’à nouveau pénétrer dans cette atmosphère viciée.

- Pardon ! Pardon, excusez-moi !  Pardon, Pardon !  Pardon, excusez-moi !  Heu, pardon, vous ne voulez pas avancer un peu ?  Pardon !

Déjà quelques-uns me décochèrent un regard réprobateur.  En pas 5 minutes de temps, je venais de les déranger trois fois de suite, fallait les comprendre.

- Tu l’as ?

- Pardon ? la musique résonnait tellement fort que je n’entendais pas réellement ce que Debbie me disait.

- Tu l’as ? cria-t-elle plus fort.

- Oui, tiens, offre-le toi même.

- Cousine, Cousine ?  Elle est trop loin, surveille Lucy, je vais lui porter ! Debbie posa Lucy sur sa chaise et elle se glissa jusqu’à la tête du U des tables.

- Pardon ? le type à côté de moi, un vieux avec une moustache rousse, me demandait quelque chose.

- Le cendrier ?  Sur ma gauche, un seul et unique cendrier trônait au centre de la table.

- S’il vous plaît ! l’autre embarqua le cendrier à des kilomètres.  J’allumai une cigarette pour lui signaler que je faisais partie de la race en voie de disparition des fumeurs.

Sans égard, je secouai les cendres sous la table.

Tout le monde bavardait, certains riaient, d’autre discutaient ferme et quelques femmes se parlaient à l’oreille de choses que probablement on ne pouvait pas entendre.

- Ils ont dit merci !

- Ca allait ? ils étaient contents ?

- Oui, très !  Où est Lucy ?  Je n’avais pas fait attention à Lucy, elle avait disparu.

- Je, heu, je..

- On ne peux décidément rien te demander !

C’était de la faute de mon voisin, il m’avait demandé mon cendrier et puis, je n’avais plus pensé à surveiller Lucy, mais ce n’était pas la peine de chercher des excuses, j’étais en faute.

- Va voir après elle, allez, bouge-toi bon Dieu ! hurla Debbie qui se contorsionnait sur sa chaise pour tenter d’apercevoir notre petite fille.

- Pardon ! Pardon, excusez-moi !  Pardon, Pardon !  Pardon, excusez-moi !  Heu, pardon, vous ne voulez pas avancer un peu ?  Pardon !

Les gens assis durent penser que j’avais pris un abonnement, je ne fis pas attention à leurs commentaires, mais plusieurs me dévisagèrent comme si un monstrueux chancre venait de me pousser sur le nez.

- Lucy !  et alors, qu’est-ce que tu fiches là ? la petite jouait avec d’autres enfants avec ces espèces de minuscules Frisbee qu’on appelle des Flippos.

- Je joue Papa, je peux rester ici ?  Dans le fond, elle était bien là, il ne pouvait rien lui arriver et elle avait de petits camarades pour ne pas s’embêter.

- Bon, d’accord, mais tu ne sors pas dehors hein, et quand tu as soif, tu viens à la table de papa et maman, c’est compris ?

Lucy acquiesça comme une enfant sage qu’elle n’était pas et m’ignora presque aussi vite après.  Leur partie de Flippos semblait tourner en sa faveur.

- Pardon ! Pardon, excusez-moi !  Pardon, Pardon !  Pardon, excusez-moi !  Heu, pardon, vous ne voulez pas avancer un peu ?  Pardon !  Ca va, elle est là, près de la sono, elle joue avec les autres enfants !

- Tu ne lui as pas dit de venir s’asseoir ?

- Mais non, laisse-la, il faut bien qu’elle s’amuse tout de même !

- C’est comme tu veux, après tout, tu as raison !

- Pardon Monsieur, vous voulez bien nous passer notre cendrier ?  Vous fumez ?  Mais nous aussi !  C’est pas votre affaire ?

- Qu’est-ce qu’il a dit ? Debbie avait très bien entendu, les grosses enceintes de la sono hurlaient, mais elle avait cependant parfaitement bien compris que mon voisin venait de nous envoyer sur les roses.

- C’est rien, je vais demander un cendrier à Cousine Mary.

- Laisse, j’y vais. Debbie fit le tour de son côté, c’était préférable, l’espace entre les chaises et le mur était beaucoup plus grand et elle devait de ce fait, déranger moins de monde.

- La place ? mon voisin, tout à coup devenu beaucoup plus aimable me demandait si la place à ma droite était libre.  C’était la place que Lucy avait refusé d’occuper.

- Heu, oui, oui, bien entendu !

Un jeune garçon, à peine plus âgé que notre Lucy vint s’asseoir à ma droite, du coup, son père, mon voisin, déménagea et ce fut la mère qui s’installa à côté de lui.

- Surtout, n’embête pas le monsieur ! lui recommanda-t-elle.

Le gamin, un petit blond avec des yeux rieurs, me regarda gentiment et sourit.

- Y a pas d’autres cendriers, mais on peut mettre nos cendres à terre ! dit Debbie en pinçant la bouche dans une grimace qui en disait long.

Deux jeunes filles passèrent avec le plateau supportant le gâteau, une magnifique pièce montée de petits choux à la crème et au caramel.

- Merci ! dis-je en prenant mon assiette.

Nous attendîmes poliment que chacun soit servi, et cela ne tarda pas.

- Où Lucy va-t-elle se mettre pour manger ?

- Je, heu, je, j’en sais rien, elle a dit qu’elle n’avait pas faim ! mentis-je.

- C’est ça, oui, elle va encore s’empiffrer de bonbons !

Lucy, comme tous les enfants, adorait les bonbons, avec en plus, la rapidité de ce cow-boy dont elle écorchait toujours le nom: Kulykuppe.

On apporta des boissons.  Une bière bien fraîche !  Quel régal !

- Ne bois pas trop ! réclama Debbie.

- C’est ma toute première, n’exagère pas !

- Bon appétit ! lança la vieille dame sur ma gauche et comme si ça avait été le signal de départ, tout le monde se mit à manger.

- Ma cuiller ?  Où était ma cuiller ? Je regardai partout sur la table, ma cuiller avait disparu.

Le gamin à côté riait.

- Tu as pris ma cuiller ?  Hein ?  Où l’as-tu mise ?  Oh, réponds, sans cuiller, je ne peux pas manger mon gâteau !

Sourd !  Le petit était sourd, ou alors il faisait semblant.

- J’ai pas de cuiller !

- Va en chercher une au comptoir !

Je tâchai de repérer une des deux serveuses, mais je vis qu’elles s’étaient attablées également pour dévorer leur part de gâteau.

- Pardon ! Pardon, excusez-moi !  Pardon, Pardon !  Pardon, excusez-moi !  Heu, pardon, vous ne voulez pas avancer un peu ?  Pardon !

Cette fois, je vis que cela commençait à bien faire, un type refusa même de bouger et je dus rentrer le ventre au maximum pour pouvoir passer derrière sa chaise.

- Pardon, vous n’auriez pas une cuiller de trop ?  Merci, c’est gentil ! Pardon ! Pardon, excusez-moi !  Pardon, Pardon !  Pardon, excusez-moi !  Heu, pardon, vous ne voulez pas avancer un peu ?  Pardon !

- C’est bon ?

- Exchtra ! Debbie se régalait.

- Où est mon assiette ?  Tu as vu mon assiette ?  Non ?

Le gamin d’à côté pouffait de rire, ses parents avaient le nez plongé dans leur assiette déjà presque vide.

- Tu as volé mon assiette ? Pas la peine, il ne comprenait pas.

- Tu ne manges pas ? ironisa Debbie.

- Je voudrais bien, mais j’ai plus d’assiette !

- T’en veux un peu à moi ?

- Je, ... non merci, je, le gâteau, ça fait grossir tout de même alors, je m’en passerai !

Une serveuse refit son apparition.

- Encore un morceau monsieur ?

- Heu, oui, oui je veux bien, mais je n’ai pas d’assiette !

- Non ?  Je fais le tour et je vous en rapporte une !

- Merci, vous êtes bien aimable !

L’odeur avait disparu !  Enfin, disons qu’on s’en était accommodé, on ne sentait plus rien, on était dedans et on s’y était habitué à la longue.

- Une autre bière ?

- Heu, oui, je veux bien ! répondis-je en scrutant la réaction de Debbie, trop occupée à racler les derniers morceaux de son gâteau.

La fille me rapporta une nouvelle assiette avec un unique choux.

- Excusez-nous, c’est tout ce qui reste !

- Ce n’est rien, c’est juste pour le goût !

Je fis glisser ma cuiller entre mon pouce et mon index et coupai adroitement une première bouchée que je-

- Papa ?

- Oui ma chérie, tu as soif ?

- Non, je veux un morceau de ton gâteau !

- Un morceau de mon gâteau ?

- Oui !

- Mais tu n’aimes pas !

- Ted !  Ne fais pas le gourmand, donne-lui un morceau !

- Viens là ma chérie, papa va couper.

Lucy escalada mes genoux pour venir s’y asseoir lourdement.

- Encore une bouchée ?

- Mmm mmm ! à une vitesse vertigineuse, mon petit choux disparut dans la bouche de Lucy.

- Encore ! dit-elle.

- J’en ai plus ma chérie !

- Mademoiselle ?  Mademoiselle ?  Y aurait-il moyen d’encore avoir un morceau pour la petite s’il vous plaît ?  Non ?  Vous allez aller voir aux cuisines ?  Merci, c’est gentil.  Attends un peu ma chérie, on va nous en apporter.  Où vas-tu ?  Tu ne manges plus ? Lucy avait subitement changé d’avis et avec l’agilité d’un gymnaste, elle s’était faufilée entre les chaises des gens pour retourner sur la piste de danse où ses camarades l’attendaient.

- Merci mademoiselle, c’est gentil ! on m’avait rapporté un autre morceau de gâteau.

Cette fois, je fis très vite, il ne fallait plus perdre de temps, ne plus laisser l’occasion aux autres de m’en priver.  Je sautai sur mes choux à la crème et au caramel.

- Paf !

- Qu’est-ce que c’est ? un truc rouge et argenté venait de s’écraser dans mon assiette.

- C’est mon PoréeAnger ! ça y est, le gamin parlait !  Il parlait !  Miracle !

- Qu’est-ce que tu as fait ?

- Mon PoréeAnger a sauté dans le gâteau de la planète Altaïr !

- Chéri, laisse monsieur tranquille ! la mère remarqua que le gamin était un peu envahissant.

- Ce n’est rien madame, ils sont jeunes, laissez, ce n’est pas grave !

- Andy, qu’est-ce que tu as fait ?  Ton Power Ranger, tu as vu dans quel état tu l’as mis ? La femme avait extrait le petit sujet de plastique de mon gâteau et elle l’avait sucé pour en ôter le caramel et la crème qui avaient maculé ses membres articulés.

- Tiens, et tâche de laisser les gens manger !  Excusez-le monsieur !

- Ce n’est rien madame ! elle n’avait pas encore le dos tourné que le gamin plongeait un doigt dans mon assiette.

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