Je me souviens de la manière dont elle ouvrait ses bras pour mieux étreindre, je me souviens de l'étincelle de son sourire qui jaillissait de son feu intérieur, je me souviens du lac de ses yeux, je me souviens de l'amour qui exhalaient de ses mots, je me souviens de cette égalité majestueuse entre nous qui lui permettait de se sentir elle et moi, moi ; je me souviens du requiem de Fauré, je me souviens de l'extraordinaire lumière des dialogues qui nous mettaient en jeu, de la façon de nous dévoiler, de nous regarder, d'apprendre à nous connaître.
Je me rappelle chaque instant et comment j'ai laissé mon être grandir à sa source, je me rappelle tous ces petits moments de bonheur qui se sont inscrits dans ma manière de penser, je me souviens de l'honnêteté qui nous servait de maison, je me souviens lui avoir demandé comment c'était possible. J'ai en mémoire les rêves que nous construisions avec cette lucidité habile des enfants, je me souviens de notre chant des signes amoureux, je me souviens de la chair de nos paroles.
Je me rappelle ce 28 juin, et je me regarde vivre, je vois ce plaisir qui est le sien, cet amour des gens qui est le nôtre. Je regarde avec beaucoup de tendresse comment de son vivant elle m'a permis de vivre et comment après sa mort elle m'a ressuscité. Je sais qu'elle n'est plus là, mais je ne sais pas qu'elle est absente, je la reconnais tous les jours