Bonjour ma belle lumière,
ce soir nous allons nous envoler, je suis à côté de toi, tes yeux mi-clos me sourient comme des friandises, ton corps alangui appelle la caresse de notre amour. Dans notre chambre claire, l'air léger nous transporte au cœur de la joie d'être ensemble. Ton souffle transporte les derniers mots de notre histoire en marche. Je t'entends à peine, tu es en moi et je suis en toi ; cette fusion admirable qui nous faisait sourire naguère prend corps. Je sens couler ton sang dans mes veines, ton soleil est mon cœur, et mon sourire soutient ton esprit. Ce soir le monde est notre espace et nous voyageons dans tous ces endroits magiques que nos rêves ont dessinés. Nous chuchotons les lettres de notre amour, elles composent nos prénoms mais aussi le noms des gens, tous ceux que nous ne connaissons pas et que nous emmenons dans notre farandole, tous ceux que nous invitons à notre fête amoureuse, tous ceux qui souffrent de ne pouvoir aimer par égoïsme, par lâcheté, ou par démission devant la difficulté de dire quel est leur bonheur ou leur envie de bonheur.
La chambre est pleine de tous ces inconnus dont on emploie la langue pour écrire notre chanson et nous allons, là, maintenant naviguer sur cette mer déchaînée pour que les embruns magnifiques rafraîchissent chacun. Je plonge mes yeux dans les tiens, tu m'offres ton cœur, ta bouche à peine mobile parcourt mon être. Nous sommes liés de plus en plus fort par cette pointe acérée qui coud nos deux cœurs. L'éternité s'annonce et nous voulons encore prendre un peu de temps, quelques gestes de mortels pour goûter un peu de quoi nous voulons faire notre vie. Oui, c'est bien de cela que nous avons besoin, ces caresses pleines de miel de douceur, ces sourires brillants d'intelligence, cette façon de nous toucher qui nous dit à chaque fois que nous existons aussi par l'autre, ces dialogues qui bornent nos vies comme des richesses qui s'additionnent, nos cœurs rythmant les musiques qui nous font danser, la joie de vivre au milieu des autres, nos regards, nos moqueries, nos gentillesses, nos belles envies de partage.Je t'ai toujours dit que tu gagnerais contre ton cancer, tu me rétorquais que tu l'éradiquerais par tous les moyens. Tu as choisi aujourd'hui de le bouter hors de notre vie, et tu vas réussir. C'est la grande épreuve de notre vie, un peu comme des murs d'acier qui se rapprochent et nous broient doucement, nos souffles amoureux se mêlent. Une dernière fois.
Je suis seul pour te dire que je t'aimerai toujours.

Joëlle est morte un 28 juin et je continue de vivre grâce à elle. Grâce à elle je ne suis pas complaisant avec ma douleur, grâce à elle je continue d'aimer, grâce à elle je continue à faire des projets. J'honore ma promesse en publiant sur mytexte.com quelques textes qu'elle avait aimé recevoir.
Elle est incroyablement vivante.