Il n’est de pires compagnes que le silence et l’absence, le silence sans fard d’un manoir de ténèbres où ne résonne que mes soupirs, l’absence blafarde de l’Autre qui aurait pu faire écho à mon cœur en pleurs. J’erre dans cet univers de misère émotionnelle en jetant mon regard perdu dans l’horizon sans fond de la désolation. Dans ce présent qui se conjugue à l’imparfait, je ne suis rien d’autre qu’un fétu de paille emporté dans le tourbillon véhément de la solitude. Mais mon passé fut-il autre que cela ? Non, bien évidemment que non. Du haut de ma montagne d’isolation, j’observe mon autrefois, et mes yeux déversent une cascade de regrets devant tout ce gâchis qui dura trente-trois années. Et que dire de mon futur dont l’essence est une fragrance pestilentielle d’échecs et de larmes ? Le néant avant, le néant maintenant, le néant après ; ma vie ne se reflète dans le miroir du destin que par une ombre vaporeuse d’afflictions. Je ne suis que vide encore et toujours.
Mais dans ma demeure de noirceur, je vois au loin s’approcher la silhouette fugace de ma seule amie, celle qui accompagne mon cœur brisé sur le chemin rocailleux du désespoir. Elle s’approche, elle est là. Elle qui affiche un sourire crispé, elle qui me tend sa main aux doigts anguleux, elle dont les yeux ne sont que crevasses abyssales, elle, la mort. La mort est ma maîtresse de solitude depuis ma naissance. Elle m’a suivi durant toute mon enfance, mon adolescence et mon âge adulte. Elle flotte au-dessus de moi telle une brume de réconfort dans ce monde d’intolérance et de rejet. Mes nuits avec elle se passent en songes étranges où je sens mon existence me quitter et s’estomper telles les couleurs d’une toile de maître exposée à un soleil de libération. Je vibre de tout mon être à chaque fois qu’elle se fond en moi, comme une brise légère qui se diffuserait à travers un champ de tournesols asséchés. Elle m’est incandescence virtuelle dans l’encre de chine de ma réalité. Et je n’attends plus qu’un seul geste de sa part pour partir avec elle dans la profondeur chatoyante de la nuit, j’attends qu’elle me tende sa faux au bois vermoulu afin que j’appose sa lame aiguisée sur mes poignets.
Et chaque goutte de sang qui s’écoulera de moi me sera semence de délivrance…
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Style : Pensée | Par w | Voir tous ses textes | Visite : 394
Coup de cœur : 15 / Technique : 8
Commentaires :
pseudo : sylvaine
J'ai l'impression que cette "noiceur", votre amie, finira un jour par apparaître dans une belle clarté...
pseudo : BAMBE
Entre nous, il y a plus doux comme compagne nocturne. Votre écriture se délecte admirablement de votre noirceur pour notre plus grand plaisir. coup de coeur!
pseudo : w
Un texte que j'ai écrit il y a quelques temps déjà... dans la torpeur amère de la peur et de l'angoisse. La noirceur actuelle de mes mots est plus... heu... lumineuse ? :-) sylvaine, ta phrase amie me touche énormément et me prodigue onguent de réconfort sur la peau de mon mal-être. BAMBE, malgré l'apparence de mes mots, je dois t'avouer un petit secret : je préfère un drap de satin à un linceul de coton ! :-)
pseudo : Karoloth
Magnifique texte. Tu as su créer une atmosphère étrangement angoissante où vont comme deux amantes la solitude et la mort. Bravo. CDC!!!!!!!!
pseudo : Iloa
Un texte qui transpire une grande sensibilité...tes draps le matin devaient être bien mouillés. Hum...
pseudo : PHIL
j'aime ce genre de noirceur!!!et ce trouble permanent!!
pseudo : w
Merci PHIL et Karoloth. J'aime créer ce genre d'univers où les émois sont enténébrés, il réside en eux une forme de catharsis pour mon âme. C'est gentil, Iloa. Après avoir lu ta dernière phrase, je me suis dit : eh beh ! elle est raide celle-là !
pseudo : JEAN PIERRE
Chapeau bas pour ces mots choisis et ciselés avec un tel talent! Ce site est vraiment un lieu de belles rencontres ! CDC en lettres majuscules
pseudo : Mignardise 974
concis, tes mots percutent et je me retrouve dans ce texte. CDC
pseudo : w
Voilà des mots très doux à mes yeux qui me motivent à écrire davantage. Peut-être pas dans un univers aussi ténébreux. Je verrai bien selon mon inspiration du moment.
pseudo : Androïde
"Et chaque goutte de sang qui s’écoulera de moi me sera semence de délivrance" Indéniablement j'aime.
pseudo : Cécile Césaire-Lanoix
Un texte sombre et poignant dont la beauté réside surtout dans le style littéraire, remarquable, et tellement poétique... Bravo ! Énorme coup de coeur. Amicalement.
pseudo : W
Androïde, il n'y a de pire destin que celui des illusions auxquels on croit. Cécile Césaire-Lanoix, merci beaucoup pour ton commentaire qui, mlagré sa chaleur, ne peut altérer la glace qui recouvre mon âme.
pseudo : Androïde
Je relis tes mots encore, encore et à chaque lecture un frisson me parcours. Ton texte, lui, n'est pas une illusion.
pseudo : w
Merci Androïde. Tes mots se font fin rayon de soleil qui transperce la lourdeur de ces nuages noirs qui surplombent mon chemin. Oui, c'est vrai, ce teste, comme les autres d'ailleurs, ne sontpas des illusions.
pseudo : damona morrigan
preuve que même dans la noirceur il y a la beauté, voir la noblesse... Celle du coeur, car c'est dans la nuit que l'on peut voir la lumière !
pseudo : w
Je suis bien d'accord avec toi, damona morrigan, puisque je ne puis concevoir le romantisme sans la présence des peines, mélancolies, souffrances et autres tourments. Et même si le soleil doré brille si fort dans le ciel bleu, il n'égale aucunement le charme poétique de la lune argentée dans le firmament des ténèbres.
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