Pourquoi me préférer la tiédeur de la cendre,
Seulement souvenir de moments jadis tendres,
Quand mon souffle nourrit un feu pur et ardent
Qui embrase plus haut et consume dedans ?

Pourquoi me préférer la fadeur sans contours
D’un rose qui pâlit, chaque instant, sans retour,
Quand je t’offre une vie drapée de vermillon
Qui transforme la route en flamboyant sillon ?

Pourquoi me préférer les petits horizons
Trop connus, trop usés aux odeurs de prison,
Quand de vastes espaces ouvrent mon territoire
Qui se veut sans limite pour chevaucher l’histoire ?

Pourquoi me préférer la floraison rentrée
D’un œillet anodin, crispé, autocentré,
Quand fièrement je me dresse, à l’image du lys
Qui, transparent, s’élève de peur qu’on le salisse ?

Pourquoi me préférer une mare passive
Aux ondes si dormantes, si lourdes, si massives,
Quand mes rêves naviguent un océan fougueux
Qui rugit comme un fauve et pourtant reste bleu ?

Pourquoi me préférer tant d’immobilité,
Des temps faits de lenteur et de docilité,
Quand mes combats ressemblent au rythme des saisons
Qui explosent et reposent entre envol et raison ?

Pourquoi me préférer un mouchoir de jardin
Où tout est retenu, attaché, rendu nain,
Quand mon regard se porte aux cimes des grands arbres
Qui, pour moi, sont de vraies cathédrales de marbre ?

Pourquoi me préférer les feuilletons de gare
Pour midinettes dont les sentiments s’égarent,
Quand ma folle épopée chante la guerre heureuse
Qui transcende les cœurs et rend la mort peureuse ?

Pourquoi me préférer la mignonne baraque
Tellement hors du temps que jamais elle ne craque,
Quand mon domaine habite un merveilleux château
Qui enracine fort et transforme en héros ?

Pourquoi me préférer de tristes chansonnettes,
Sans âme et sans musique, lancinantes sornettes,
Quand je veux t’emporter dans une symphonie
Qui te happe et t’enivre, loin de ton agonie ?

Pourquoi me préférer l’ombre des catacombes
Où rampent les sectaires, de l’autel à la tombe,
Quand mon culte vénère un panthéon glorieux
Qui inonde de joie et les hommes et les dieux ?

Pourquoi me préférer les étrangères fêtes,
Drogues molles et snob pour falsifier les têtes,
Quand je respire le vent de la grande santé
Qui fait trembler de peur tous les désenchantés ?

Pourquoi me préférer le vulgaire, le commun
De la masse soumise aux plus vils instincts,
Quand ma quête poursuit la singularité
Qui récolte partout l’impopularité ?

Pourquoi me préférer le confort arrêté
Des éternels frileux toujours prêts à traiter,
Quand mon esprit produit tant de pensées rebelles
Qui font offense aux cons d’autant plus qu’elles sont belles ?

Pourquoi me préférer ces creuses certitudes
Stériles rejetons d’une égale hébétude,
Quand mon doute génère la créativité
Qui éclaire et irrigue ma moindre activité ?

Pourquoi me préférer le malheur assuré
Du rythme répété des jours trop fissurés,
Quand mon futur promet une lumière violente
Qui, malgré tes blessures, te sanctifie vivante ?

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*   *

Seul un enfant pourrait expliquer tout cela,
Un enfant cœur du monde et parfois au-delà.
Mais il faut être mère pour croire les choses telles,
Penser que son petit analyse comme elle.

Pour lui-même ce qu’il sait tient à ce qu’il ressent.
Il puise sa gaîté dans celle de maman.
Son chagrin disparait quand il la voit sourire
Car il privilégie le bonheur qu’il inspire.

S’il découvre demain, de plus en plus souvent,
Que celle qu’il adore a le regard absent,
Il comprendra très vite que, dans son cœur, sommeille
Un amour insoumis qu’il faut rendre au soleil.