Dans un éclair traverser le hall d'entrée, appuyer promptement sur le bouton de l'ascenseur. En général, il ne met pas moins de trois minutes avant d'arriver...
Fixer la porte de l'ascenseur, surtout ne pas se retourner, pour ne pas risquer de voir quelqu'un.
Soudain un bruit dans l'escalier, des personnes entrent, refermant la porte vigoureusement. Elles se rapprochent dangereusement de mon périmètre.
C'en est trop! La peur m'assaille et m'étreint. Plus de réflexion, il faut agir.
Je renonce précipitamment à l'ascenseur pour ne pas croiser de voisins.
Vite grimper l'escalier, avaler les marches deux par deux, pour être plus rapide qu'eux.
Enfin arrivé devant ma porte d'entrée, sans respirer, rechercher frénétiquement mes clés, et déverrouiller.
Ouvrir la porte avec fracas, la refermer sur moi.
Plaqué contre la porte, la respiration arrêtée, le souffle court, essuyer ma sueur.
Et repousser aussitôt le verrou d'un geste sec et rapide.
Ressentir un grand soulagement. Se sentir enfin en sécurité, enfin chez soi, à l'abri du monde et de ses habitants.
Puis, l'oreille collée contre la porte, surprendre une conversation.
Deux voisins se disent des banalités, ils parlent fort et sans complexes. Apparemment ils se sont accordés à démonter la même personne, pour le même motif. Argumentant avec des paroles insidieuses et ironiques dont le fondement paraît sensé.
Même si j'entends toutes leurs paroles assez distinctement, jamais je ne pense qu'ils sont en train de parler de moi.
Comment serait-ce possible qu'ils parlent de moi, car ils ne me connaissent pas...
D'ailleurs je ne leur en ai jamais donné l'occasion de me connaître. La peur est trop grande en moi...
Pourtant, la réalité ne ment pas, pas de doute, ces gens-là parlent de toi, et de tes "bonjour express"dont tu les gratifies à l'occasion.
Les voisins !
Impossible de les voir, rien que pour leur dire « bonjour », c'est un effort incroyable, de là à leur parler, même pour leur servir des banalités, cela m'est impossible...
Avec moi, ils n'ont pas fini d'épuiser le sujet, je n'irais sûrement pas leur dire mon sentiment et les moucher, bien que l'envie en soit grande.
Ce qu'ils voient de moi, ce n'est pas ma vraie personnalité.
Suis-je vraiment la personne froide et sans-cœur qu'ils dépeignent ?
Malheureusement, je ne peux pas me défendre, c'est au-dessus de mes forces...
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Style : autre | Par Batoule | Voir tous ses textes | Visite : 935
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Commentaires :
pseudo : Najah Hamid
Waw. Je me suis senti concerné. Très captivé par ta narration... C est un témoignage. Une déclaration. C est un aveu… C étais moi .ton je…effectivement...tu parlais de moi…de toi. Et d autres comme moi comme toi…. Je Ne Me retourne pas. Pas par risque. Mais par envie. Par peur de voir quelqu'un..., il faut agir. J agis exactement comme Toi j ai pas d ascenseur….je grimpe pas l escalier et j avale pas les marches deux par deux, J habite au ré de chaussée….deux escaliers et me voila dans ma demeure...Je meurs de peur de l autre. Je rentre et je m enferme dans ma chambre…je dessine…des jours et des jours. Sauf si j ai répétition ou représentation ou cours…je ne quitte pas ma chambre….Pour toi…c est senti une pression. Et j ai dis c est trop…BATOULE… pas tant que ca... Arrêter ta respiration... Essuyer ma sueur. L’oreille collée contre la porte, même si ta peur est trop grande… Malheureusement, tu ne Peux pas te défendre, c'est au-dessus de tes forces..mais tes forces c est ce très beau texte ...ce beau partage..
pseudo : Batoule
Najah Hamid tu es un sage, tu ressens les sentiments à la perfection. Cette personne qui a peur des autres et de soi-même, beaucoup sont comme cela, mais qui le sait? moi je le suis, mais le moi d'avant. Non, c'est toujours moi, mais je me contraint à garder des liens sociaux pour rester humaine et me sentir mieux. Merci Najah d'avoir ressenti comme moi, je me sens moins seule!
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