L' enterrement: Le brouillard, je m' en souviens, ce voile épais qui endormait la campagne, qui semblait même avaler la vie dans son silence feutré. Ce jour là il y en avait, chaque objet, chaque personne, n' étaient que silhouettes fantomatiques. Le clocher de l' église avait disparu mais on l' entendait sonner le glas dans cette matinée d' hiver sans neige, rien qu' un sol humide et boueux, triste, et ce brouillard à vous glacer le sang. Tout le monde était là, toute la famille était présente, y compris des gens que je ne connaissais pas, que la vie n' occupait pas assez et qui venaient juste "regarder". Ils sortirent par la grande porte de l' église, par petits groupes, sans un mot, seulement quelques murmures. Tous étaient emmitouflés dans leurs vestes, doudounes, capuches, écharpes et chapeaux. Certains avaient pleuré, on le voyait à leurs yeux rougis par les larmes ou par le maquillage des femmes qui laissait de grandes marques encrées sur leurs joues, mais ils n' étaient pas nombreux, parmis eux il y avait ma mère et ma grand-mère, qui marchaient côte à côte les mains croisées dans le dos. Il y avait aussi mon père et mon oncle, assis sur le muret de pierre qui faisait face à la grande porte de l' église et mon grand-père, qui faisait les cents pas avec ma soeur sur les pavés humides qui miroitaient la lumière blafarde de cette journée funeste. Puis le cercueil sortit, sur les épaules de quatres porteurs aux visages neutres, sans expressions aucunes. Les gens formèrent le cortège funèbre, le défunt en premier, la famille juste derrière et les inconnus en dernier, tous avaient la tête vers le sol et marchaient d' un pas lent et mesuré. Le glas vibrait toujours au rythme du cortège, dans ce ciel encombré, indifférent, froid comme l' intérieur du cercueil de sapin. La grille du cimetière fut poussée, grinça imperceptiblement. Chaque pas déplaçait les gravillons de l' allée et tous ces gravillons déplacés résonnaient comme une marche militaire. Le cortège formait maintenant un cercle autour de la tombe, les fossoyeurs venaient de terminer leur travail et se tenaient à l' écart en appuis sur leurs pelles, discutant entre eux à voix basses de sujets inconnus. Le glas cessa doucement, coup aprés coup, à l' image d' une vieille boite à musique maléfique. Le silence fut rompu par le discours et les prières rectilignes du prêtre. Certaines personnes pleurèrent à nouveau, ma soeur entra dans un sanglot qu' elle ne pouvait contrôler, d' autres laissèrent couler des larmes silencieuses, ma mère et ma grand-mère approchèrent un mouchoir de leurs yeux. Le cercueil descendit lentement sous la terre et toucha le fond du caveau dans un son creux, chaque personne y lanca de l' eau bénite en faisant le signe de croix. Quelques fleurs furent lançées à l' intérieur et une petite pelle fut donnée à ma mère et à mon père, alors ils jetèrent les premières poignées de terre symboliques sur le couvercle. C' est à ce moment et quand je vis mes parents éclater en sanglots bras dans les bras, que je compris que c' était moi, leur fils, qui reposait à jamais dans ce cercueil. La suite je ne la connais pas, la suite je n' en sais rien, la suite ... j' attends ... M.A
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Commentaires :
pseudo : Karoloth
Décidément on est dans les histoires de fantômes en ce moment. Cet enterrement est bien décrit et je me demandais qui pouvait bien être inhumer. J'avoue que la chute m'a pris de court. CDC!
pseudo : nani
Je crois que c'est un rêve inavoué pour beaucoup que de vouloir assister à ses propres funérailles même la vie achevée l'homme ne peut assouvir sa soif de commenter, de voir par le petit trou de la serrure quoique là ce serait un peu difficile....
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