La vie dans le village de Mishizu était bercée par la joie et la gaieté. Les parents allaient et venaient du travail, les enfants couraient dans tous les sens. Aussitôt arrivés de l'école, ils prenaient leur goûter et se précipitaient vers le jardin central pour jouer au loup glacé. La brise du printemps les faisaient voler dans le ciel. Les étoiles qui scintillaient durant les nuits d'été les faisaient rêver d'aventures extraordinaires. La pluie des longues nuits d'hiver les rendait encore plus heureux. Ils pensaient que c'étaient des cordes que les magiciens leur envoyaient pour qu'ils accèdent à des mondes merveilleux où toutes les villes seraient comme le village de Mishizu.
Hidemi était heureuse de vivre dans cet endroit avec ses petits amis. Elle et ses parents vivaient depuis toujours dans une maison au bord du fleuve Hisano, qui venait se promener entre les rues du village et bercer les habitant de son doux cheminement. Hidemi vivait des jours heureux. Elle aimait ses camarades, et avait grâce à eux développé une imagination fantastique. Elle remerciait chaque jour Dieu de lui avoir donné une si belle vie. Elle apprenait à faire plein de petites choses que tous les enfants du monde faisaient : faire de grosses bulles avec le savon lors des bains, apprendre des devinettes, faire de beaux dessins des arbres feuillus qui nourrissaient le village d'un air pur. Du haut de ses huit ans, elle était sûre que le monde était un endroit parfait où tout le monde était heureux
Lorsqu'elle s'endormit un soir d'été, elle rêva comme d'habitude qu'elle volait dans un grand champs verdoyant. L'herbe rase dégageait une odeur de jasmin. Les clotûres blanches scintillaient au soleil. Ses camarades s'émerveillaient devant beauté de Hidemi quand elle volait. Elle montait dans le ciel jusqu'à sentir l'ai froid lui picoter le nez, puis elle déployait majestueusement ses ailes et descendait gracieusement en épousant la forme d'une colline. Quoique cette nuit, elle remarqua que l'herbe était moins verdoyante, les visages moins perceptibles. Le vol était aussi moins gracieux, elle sentait le froid lui pincer la poitrine. Que se passait-il ? Il fallait atterrir d'urgence, car il devenait de plus en plus difficile de garder l'équilibre en vol plané. Hidemi heurta le sol avec un bruit sourd, abîmant sa robe blanche comme un nuage de printemps. Pourquoi le rêve était-il différent ? Les autres enfants s'approchaient d'elle, aussi surpris que leur amie de la soudaine chute. Ils s'amassaient pour la questionner du regard, pour découvrir ce qui a mis fin à leur spectacle. A mesure qu'ils s'approchaient d'elle, Hidemi vit qu'ils paraissaient tristes et abattus. Ils s'arrêtèrent, fixèrent leur amie durant ce qui parut être une heure de sommeil. Puis, l'un après l'autre, ils tournèrent les talons, et s'éloignèrent peu à peu d'elle. Certains jetaient un dernier coup d'œil, avec l'espoir de la voir à nouveau prendre son envol. Mais rien ne se passait. Hidemi restait là, immobile comme la roche, les yeux écarquillés de surprise.
« Qu'est-ce qui m'arrive ?», se demandait-elle. Ils s'éloignaient de plus en plus d'elle, l'échine courbée, comme s'ils n'allaient plus jamais la revoir.
« Revenez !, disait-elle, tenez, regardez, je revole ! ». Mais rien ne se passait. Elle sautait de tout l'élan que lui donnaient ses petites jambes, mais la loi impitoyable de la gravité avait raison de ses efforts. « Revenez, je suis toujours la même. Ne me quittez pas, j'ai peur toute seule. J'ai peur... pitié ». Rien. Le silence était sa seule réponse.
Le rêve n'était plus. Hidemi sentait maintenant la chaleur peser. Un nœud enroulait son cœur et les arbres qui l'entouraient. Les clotures devinrent grises, marron foncé, puis noir de geai. Il faisait de plus en plus chaud. Elle transpirait maintenant, et voulu enlever le nœud qui la serrait, qui serrait tout son rêve.
« Non, laissez-moi, je veux voler, je veux voler !! J'ai peur toute seule ici, aidez-moi ! ». Elle essuya sa sueur avec un pan de son courvre-lit, ce qui la surprit. Est-ce qu'elle était toujours dans son rêve ? Comment pouvait-elle sentir entre ses mains un tissu qu'elle ne tenait même pas. Et puis cette chaleur ! Assez ! Elle donna un grand coup de pied à son matelas, qui alla voler au bout du lit. Hidemi se leva en sursaut, sentant une bouffée de chaleur l'envelopper. Elle haletait, son cœur battait à tout rompre. Il fallait qu'elle y retourne, vite ! réparer son erreur, faire en sorte que ses amis de toujours ne la quittent plus ! Elle ne pouvait pas s'imaginer vivre sans l'espoir quotidien de les voir s'émerveiller de sa grâce au vol. Chacun avait une place unique dans son monde. Elle sentait que son cocon se brisait par le haut, laissant s'engouffrer des ténèbres glaciales.
Hidemi n'était plus une enfant.
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Style : Nouvelle | Par chaoukisaad | Voir tous ses textes | Visite : 511
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