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Une nuit sur Terre par cymer

Une nuit sur Terre

   Le soleil descendait derrière les arbres. Au début du printemps, les senteurs de la garrigue imprégnaient la bise du soir de leurs odeurs ennivrantes. Le thym et le buis en fleur lançaient leurs parfums au détour des chemins et la montagne resplendissait de couleurs florales. La crête du mont Ventoux, suivi des chênes verts et des grands acacias, se mis soudain à rougir dans les derniers rayons de la journée. Le feu du crépuscule se répendit à tous les paysages de la Provence et au ciel vide de tout nuage, directement ouvert sur les premières étoiles de la nuit.

   Jirome marchait seul, perdu dans ses pensées qui s' éparpillaient dans sa tête comme les pétales des fleurs d' acacia dans les respirations du vent. Il suivait le tracé du chemin qui se perdait à travers les buis qui avalaient les dernières lueurs crépusculaires.

   Malgrés la nuit qui descendait sans bruits, il n' avait pas l' envie de rentrer chez lui, il connaissait le chemin qui reliait le village dans la vallée comme sa poche et ses 30 ans de célibataire sans enfant lui laissait toute la liberté qu' il désirait. Seuls quelques oiseaux brisaient le silence assourdissant où les grillons chantaient leur fond sonore thérapeutique.

   Soudain, au même moment où l' obscurité semblait prendre possession des formes et des ombres, une lueur blafarde naquit sur l' horizon, Jirome s' arrêta et respira à pleins poumons pour s' emplir de cet air et de cette ambiance nocturne, lorsqu' il expira, les courbes des montagnes accouchèrent de l' astre lunaire, applaudi par le scintillement des étoiles.

   Il reprit sa marche légère en expédiant ça et là quelques cailloux du sentier dans les buissons épineux. Après une brève montée, il atteint le sommet d' une crête calcaire. La lumière bleuâtre de la lune ascendante teintait la roche qui tranchait avec les ombres de la végétation dont le feuillage jeune scintillait selon ses mouvements.

   Debout au bord du précipice de ce promontoir rocheux, Jirome gouttait avec délice à la brise nocturne qui froissait ses cheveux mi-longs et humidifiait ses yeux clairs.

   Le bruissement des acacias et des chênes verts remplassait à présent le murmure des grillons et toute la grandeur de la provence s' étendit dans l' infini de cet illustre paysage. Au loin, les dernières neiges du mont Ventoux répondaient aux ténèbres comme une vierge phosphorescente.

   L' homme recula de quelques pas puis se retourna pour réfléchir, un genévrier l' accompagna dans sa démarche en se dandinant sous les effets du vent et en frôlant son épaule de ses épines masquées par les pétales de ses fleurs naissantes.

   C' est à ce moment que Jirome retrouva le sens de toutes ces bribes de pensée qui s' étaient perdues dans sa tête, il refit face à cette immensité naturelle qui l' avait aidé dans son ménage mental, il avait compris.

   Le village formait des point lumineux en contrebas de la falaise et surgissait de la nuit comme les étoiles dans le firmament, on devinait à peine l' église de pierre et son clocher de fer forgé.

   Il se mit assis au pied d' un rocher abrité du vent, ou poussaient quelques branches de thym et de lavande qu' il ne voyait pas mais qu' il pouvait sentir dans les effluves de ses mouvements.

   Jirome avait compris. Sous la clarté de ses yeux, la finesse de ses cheveux chatains et son teint donné par le soleil et les pluies, il faisait partie de la nature et sa vie d' homme libre lui convenait parfaitement car il ne pourrait plus jamais se défaire des liens qui l' attachent à ces paysages maintenant que ses pieds ont pris racine dans la terre.

   Soulagé, heureux et conscient de sa chance de pouvoir apprécier la vie, il décida de ne pas rentrer chez lui et de profiter de la douceur de cette nuit claire, alors il s' endormit paisiblement jusqu' au matin, bercé par les sons et les odeurs qui faisaient de cette terre son monde.

                                                                         
                                                                              Mercy.

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Style : Réflexion | Par cymer | Voir tous ses textes | Visite : 274

Coup de cœur : 7 / Technique : 7

Commentaires :

pseudo : Karoloth

Magnifiques descriptions de ce pays magique. "Ah quelle chance tu as Jirome." CDC!

pseudo : chollet mikael

J'ai été, dans le temps, un lecteur assidu de Jean Giono et je retrouve un peu ses atmosphères dans ce texte. Continue, c'est très bon.