Paris, ville des Lumières, et pourtant si sombre. J'arpente ses profondeurs, la capitale recèle bien des secrets au fond de ses entrailles et je suis curieux d'en découvrir quelques-uns. J'ai descendu toutes les marches, toutes ces froides marches usées par les Parisiens. Ils semblent étrangers à eux-mêmes, chacun se retrouve seul dans sa multitude. Je suis aussi seul qu'eux, mais je l'ai choisi pour mieux me fondre dans cette lente et morne compagnie. Ces gens sont laids. Leur langueur, leur lassitude et cet insupportable faciès triste et terne, tout cela les rend laids. Le peuple de Paris fait peur à voir ! Mais la nature est ainsi faite, et sous la ville, les racines centenaires voient la faune courir, galoper, grouiller ; des vies qui meurent, des morts qui marchent, absents, aveugles à la violence qu'ils se font à eux-mêmes, de par leur ignorance. On ignore quelles fourmis ont creusé ces tunnels, quelles chenilles ont inspiré ces énormes wagons de fer ; et surtout, pourquoi ai-je cette infâme et dégoûtante vision en contemplant le dégueulis des passagers par leur hôte ? Le métro me semble être un immense lombric, grouillant de vers aux couleurs sombres et froides. On peut les voir se tortiller à travers sa peau de plexiglas, investissant le moindre espace, ils se pressent, se collent à toutes les surfaces, et quand vient le moment pour le long mollusque de respirer, c'est pour vomir ces immondices hors de lui, en espérant qu'il n'y en ait pas plus au retour.
Je voudrais réussir à ne pas respirer pour ne plus sentir la puanteur de ce magma sans nom, et retenir mes haut-le-coeurs pour qu'ils ne découvrent pas tout ce qu'ils m'inspirent.
Je remonte quatre à quatre les marches et emplit mes poumons d'un autre air, moins vicié, moins dégoulinant de cette humanité poisseuse. Si cela faisait partie des secrets de Paris, j'aurais préféré qu'il en reste un. Toute réalité n'est pas bonne à découvrir, ni à vivre.