Comme chaque matin, depuis que je vis seule dans cette résidence universitaire, j'ouvre ma fenêtre. J'espère désespérément voir quelque chose ou peut être quelqu'un. Mais tous ce que je vois ce sont des arbres qui me rappellent ma journée. Ma vie d'avant me manque, plus que je n'ose le dire. On dirait qu'autour de moi tout est faux et même moi, je le deviens.
J'ouvre comme tous les matins, depuis que j'ai quitté ce qui me rendait heureuse et vraie, la fenêtre de ma propre hypocrisie.
Tous les matins, depuis quelques mois, je l'attends. Ma camarade de classe : Anne, je la connais depuis l'année dernière et elle n'a pas dû tout changer, ce qui est vraiment déplaisant parfois. Comme toujours c'est moi qui attends, peut être que je devrais l'appeler pour lui demander ce qu'elle fait. J'ai envie de partir sans l'attendre, mettre de la musique et marcher pour penser à avant.
Oh, mais qui vois-je qui arrive ? Anne, enfin, c'est pas trop tôt, j'aurais aimé lui dire. Mais comme tous les matins depuis plusieurs mois, lorsqu'elle me dit :
_ « Alors, comment ça va?
_ Ça va, j'ai pas trop bosser et toi alors? »
Elle ne s'excuse même pas de son retard, et moi je ne dis rien comme d'habitude, je souris et j'écoute. J'ai tant de choses à dire et pourtant, tous se cache derrière ce faux sourire. Et comme tous les jours, elle va me parler de sa vie en finissant par dire :
_« C'est vous, qui vous intéressez à ma vie les filles !! ». Franchement, si elle ne veut pas nous parler de sa vie, qu'elle n'en parle pas. Encore quelque chose que je ne lui dirais jamais je pense, et que je ne dirais à personne.
Le chemin jusqu'à l'école est long, dès fois trop même, mais bon si je voulais vraiment pas faire la route avec elle je devrais lui dire. Mais voilà, qu'elle se met à parler de lui, son petit ami depuis exactement deux jours. Et déjà elle se fait des films.
Anne s'est le genre de fille qui s'imagine des choses alors qu'il n'y a rien. Les garçons diront surement que Anne s'est vraiment une fille. Pour lui faire plaisir, j'écoute et comme elle, je glousse et rigole. Je vais pas me plaindre pour une fois qu'il se passe quelque chose d'intéressant. Elle me raconte leur petite soirée à deux hier, quand ils se sont vus pour la première fois. Eh oui, parce que ce garçon Anne le connaît grâce à facebook et msn. Et maintenant, ils sont ensembles. Et maintenant, elle m'ennuie avec ces histoires répétitives, elle se pose toujours les mêmes questions. Combien de fois, devrais-je y répondre pour qu'elle finisse par comprendre? Je parle le russe il semblerait!
Mais je suis une gentille fille, donc comme d'habitude je vais lui sourire. Un sourire cache tous et résout tous. En sortant parfois des « ohhh!! », « non, c'est pas vrai », « quel idiot celui là », « oh c'est trop chou ». Cela lui suffit on dirait. C'est amusant ce genre de discussion, mais là c'est trop.
Elle me dit des choses qui commencent à ma fatiguer, si tôt déjà le matin :
_ « Non, mais sérieux, il répond pas à mes textos, il m'énerve!
_Anne, tu n'as pas à t'énerver pour si peu, peut être qu'il a un problème et qu'il peut pas répondre
_ Non mais ça va pas le tuer, de m'appeler ou de m'envoyer un texto quand même. Ça m'énerve je tombe que sur des garçons énervants
_ Tu crois pas que tu exagères un peu
_ Non mais moi je veux un copain qui m'appelle et qui répond à mes textos
_ C'est vrai que les garçons envoient beaucoup de texto..
_ Eh bien voilà. Franchement ça m'énerve les gens qui ne répondent pas au texto »
Ce qu'elle vient de dire est tellement vrai, surtout pour elle. Elle ne répond jamais au texto et elle ne décroche pas quand on l'appelle, si elle savait comme c'est énervant.
Oh voilà qu'elle vient de dire quelque chose d'ahurissant, elle veut le quitter. Cela fait exactement un jour qu'ils sont ensembles et elle veut le quitter parce qu'il a pas répondu à son texto.
Franchement, je plains les garçons, les filles sont vraiment énervantes et ennuyeuses. Ce qu'elle me dit c'est vraiment du n'importe quoi, mais bon sourions et écoutons.
_« Franchement, Julie, je vais le quitter. Il m'énerve. C'est lui qui vient, qui me dit que je suis jolie, qu'il veut sortir avec moi, et qu'il veut me voir. Et là, je lui demande si c'est toujours bon pour ce soir, il répond pas. Mais il se moque de moi, ce mec
_ Donc tu as envie de le voir alors, appelle-le. Peut être qu'il n'a plus de crédit.
_ Mais non j'ai pas envie de le voir, et je vais pas l'appeler. Il va croire que je lui courre après. C'est à lui de me répondre.
_ Et bien, pourquoi veux-tu mon téléphone alors ?
_ Oh je veux lui envoyer un texto, mais je sais pas quoi mettre dedans
_ Je sais pas non plus, mais réfléchis bien. Il ne faudrait pas que tu regrettes après
_ Oui je sais. On arrive ne le dis à personne. »
Enfin, mon calvaire est fini. Maintenant nous allons être plusieurs à supporter sa vie.
Dès que nous arrivons, comme d'habitude, il faut sourire et dire bonjour. Rien qu'une fois j'aimerai vraiment être heureuse rien qu'en voyant quelqu'un.
Quelques minutes plus tard, nous voilà en cours. Comme d'habitude, je vais m'ennuyer, je ne trouve personne à qui parler, alors qu'avant je parlais souvent et je m'ennuyais jamais. Aujourd'hui tous ce qu'il me reste ce sont des souvenirs et les études. Je me demande si je ne ressemble pas à une femme aigrie en disant cela. Pourtant je suis encore jeune, allons enfants, courage!!
Oh mais qu'est ce que j'entends à ma droite, ce ne serait pas Anne qui serait entrain de raconter son histoire alors qu'il me semble qu'elle m'avait dit qu'il ne fallait le dire à personne.
Enfin ne disons rien, sinon elle va encore me dire que je me trompe et que c'est moi qui à répéter. Franchement celle là, elle est gentille mais parfois elle dépasse les bornes. Comme si j'avais envie de raconter sa vie à tous le monde, elle devrait un peu essayer de se mettre à la place des autres, pour voir.
Après ces deux heures de cours plutôt ennuyante, voilà enfin la pause. J'ai envie de parler mais je suis sur que c'est un sujet qui n'intéresse personne. Je crois que je vais de nouveau m'intéresser à Anne et son histoire, je vais sourire, glousser et rigoler. Que du faux, qui paraît tellement vrai.
Serais-je un jour naturel ? Je me le demande et dire que même moi je ne sais pas la réponse.
Anne me parle, j'ai pas envie d'entendre, elle ne fait que parler même en cours. Ensuite elle vient me voir dans ma chambre parce qu'elle n'a pas compris si au moins elle écoutait. Ou alors elle se met à pleurer pour me dire que sa vie est fini parce qu'elle n'a pas réussi ce contrôle. Si au moins, elle écoutait, c'est toujours à moi de faire tous le travail pour elle.
Bon je vais l'écouter je vais lui répondre sinon elle va me dire que je lui fait la tête. Et j'aurai envie de lui répondre mal et lui dire : « Oui, ça ne se voit pas. Avec ton caractère normal que même pour moi la patience a des limites ». Mais bon, je ne lui dirais pas.
Elle veut venir dans ma chambre tout à l'heure. J'ai répondu oui, je n'ai pas envie mais bon, est ce que je peux vraiment dire non.
Enfin, c'est fini. Quelle journée épuisante, après tous ces gloussements, je vais encore entendre son histoire avec son petit ami enfin je me le demande vraiment et sur l'ancien garçon qu'elle aimait.
Ma journée est loin d'être fini on dirait. La solitude me pèse, j'aimerai que quelqu'un voit que tout ce que je montre est faux.
Nouveau moment avec Anne, dans ma chambre à me parler de ces amours. Elle pense que je suis sotte, je crois. Je sais très bien qu'elle n'a pas oublié Michel, celui qu'elle aimait l'année dernière et qui la rejeter et dire qu'elle s'est remise à l'aimer cette année. Cette fille est trop indécise, je me rappelle même plus le nombre de fois où je le lui ai dis et elle ne comprend toujours pas.
Elle me dit que son nouveau copain a un cousin qui est dans la famille de Michel. Et que maintenant elle est aussi dans sa famille et qu'elle connaît toute sa vie. Mais quand je lui dis : « Tu es sur que tu ne l'aimes plus ». Elle me dit que non et qu'elle le déteste. Parfois, je me demande vraiment si elle se rappelle que je suis aussi une fille. Je sais très bien qu'elle l'aime encore et si elle le ne l'aimait plus alors, il l'indiffèrerait. Mais bon, si elle veut se mentir à elle même c'est son choix.
Mais qu'elle arrête de venir me raconter sa vie si elle n'est pas capable de comprendre.
Franchement c'est dur d'être une fille et parfois d'être amie qu'avec des filles.
Et ce soir, en allant me coucher, je vais refermer cette fenêtre. Fenêtre ouverte sur toute mon hypocrisie et ma fausseté. Je vais refermer ce qui fait que les autres m'apprécient, ma fausseté. Ce que je montre et ce que je leur dis tout est souvent réfléchi.
La spontanéité me manque, et j'attends toujours cette personne qui me mettra en claque. En me disant enfin que je peux arrêter d'avoir ce sourire si laid, ce sourire si faux.
Un jour peut être qu'en ouvrant cette fenêtre, je finirais par l'apercevoir. Quelqu'un qui me comprendrait enfin, quelqu'un qui saurait me dire pourquoi je suis comme cela.
"Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur est interdite"
Style : Nouvelle | Par Tara | Voir tous ses textes | Visite : 320
Coup de cœur : 10 / Technique : 9
Commentaires :
pseudo : Ombres et lumière, une vie
Continuez. Vous avez cet indéfinissable qualité de saisir ce qu'on a du mal à voir. Ceci écrit sans hypocrisie. Cdc
pseudo : Ombres et lumière, une vie
Continuez. Vous avez cette indéfinissable qualité de saisir ce qu'on a du mal à voir. Ceci écrit sans hypocrisie. Cdc
Nombre de visites : 1016