Vous êtes tous en colère, c’est de ma faute.
Je suis sur des échasses, je vous domine, insaisissable je tourne autour de chacun d’entre vous, un sourire insolent au coin des lèvres, vous fulminez…je désespère.
Il est là, enraciné au milieu de vos cris, il me scrute. Quelques mètres nous séparent l’un de l’autre. Entre nous…Il y a vous.
Transformés en ombres furtives j’entends vos appels mais je n’y prête déjà plus attention.
Je peux sentir sa tristesse me mordre violemment la poitrine et pourtant je suis encore loin de lui.
Vous continuez à glisser tels des fantômes de mauvais goûts entre nous, une danse fluide qui ne m’impressionne pas.
Vos visages ont tous disparus, il ne vous reste qu’un trou béant, anciennement désigner « bouche » pour psalmodier vos réprimandes que je n’entends déjà plus.
Je descends de mes échasses, elles retombent bruyamment au sol mais le claquement sourd du bois contre le sol ne résonne pas. L’air est copieusement lourd.
Debout maintenant, j’entreprends de me rapprocher de lui, je commence à marcher dans sa direction.
Je vous ignore complètement vous n’êtes plus que des miasmes insignifiants et vos mains qui m’agrippent retombent sans force le long de vos corps décharnés.
Mes pas sont naturels, je m’étonne de l’assurance avec laquelle je marche pour le rejoindre. Je vois ses larmes qui s’accrochent désespérément à sa mâchoire pour finalement s’écraser sur son cou.
A cet instant précis, je ne me moque plus de qui que ce soit j’ai même de la compassion pour vous, finalement je regretterai presque de vous avoir fait mal pour ne plus avoir mal.
Il me parait si grand, si imposant tandis que son regard humide n’est autre que celui d’un enfant apeuré.
Nous sommes face à face maintenant, ses yeux sont plongés dans les miens, je suis toute petite…petite…Il me domine en tout point.
C’est trop dur, je n’y tiens plus. Doucement mes bras m’échappent et comme attirés irrémédiablement vers lui, je l’enlace. Sans pudeur ni frayeur, je le serre de toutes mes forces, qu’il cesse de pleurer.
Son corps est froid, dur, presque aride. Je sens bien qu’il ne comprend pas mon geste, mais après l’étonnement s’en suis ses bras qui à leurs tours m’entourent.
Je m’abandonne complètement, mon visage lové contre sa nuque, une main caressant son dos musclé, l’autre ses longs cheveux soyeux…Il est si doux.
Il peut fondre entre mes bras si je me plaît à trop l’aimer, il me faut faire attention.
Il n’a pas cessé de pleurer mais il n’est plus seul et je pleure avec lui.
C’est une espèce de fusion, un échange pathétique de blessures et douleurs malignes.
Nous sommes consentants.
Plus tard je me réveille dans une pièce assombrie par des volets mi clos, je me frotte doucement les yeux, je le vois, assis sur le lit et dans ses bras un bébé. Le notre apparemment. Un beau bébé qui lui ressemble beaucoup. C’est alors que je comprends tout, ça me brûle à l’intérieur mais qu’a cela ne tienne, si j’en crois l’instant présent j’ai une famille, ses larmes ont disparues pour laisser place à un large sourire si il est heureux alors tant mieux, je jouerai le jeu jusqu'à ce que le nuage se dissipe.
Il y a cette maison aussi, dans laquelle nous nous installons pour fuir le reste du monde. Perchée au milieu de nulle part à quelques mètres de là, une mer calme et limpide draper par un sable blanc d’une finesse inégalable.
Ça sent bon la coco et les fruits exotique, main dans la main on marche le long de la plage. Image glamour de brochure de magasine… Je n’ai plus beaucoup de temps alors je le serre fort contre moi, je m’approche de son oreille et lui murmure que tout ceci n’est qu’un rêve, qu’il ne devrait pas y être et moi non plus d’ailleurs. Je lui dis que j’ai aimé ça malgré tout, que j’aurai pu tomber amoureuse de lui dans d’autres conditions. Je lui dis aussi que la vie peut changer, j’espère qu’il m’aura entendu de là ou il se trouve. Je termine en lui disant que si je le croise un jour quelque part, j’irai le voir…Où pas…
Je lui souhaite bonne chance et l’embrasse une dernière fois. Le vent iodé c’est déposé sur ses lèvres, c’est agréable.
Je me retourne, les pieds emmêlés dans la couette, les coussins éparpillés de ci de là, j’ouvre mes yeux, il fait gris dehors. Je ne peux m’empêcher d’avoir ce petit vide à l’intérieur de moi. Je pense à lui, normal…Je me pose beaucoup de question le concernant, comment va-t-il ? Aux dernières nouvelles, il ne pouvait pas aller plus mal… Putain de vie.
Assise sur le lit, le regard perdu vers un ciel bas sans couleur je pousse un soupir…
C’était bien de rêver de lui comme ça, j’aurai pu vraiment tomber amoureuse de lui…
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Style : Nouvelle | Par Meigetsu | Voir tous ses textes | Visite : 599
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