POM POM POM 3- Les taches
Le Papa de POM-POM-POM est toujours en salopette bleue. POM-POM-POM trouve que c’est le plus beau vêtement que puisse porter un Papa. En outre il y a des tas de poches, pochettes, raglans, fermetures et autres boutonnades fantôches. A chaque coup d’œil elle en découvre encore.
De temps à autre, des taches de gras, de noir, de rouille, de cambouis tombent dessus comme des feuilles d’automne. Elles ont vite disparu. Certaines pourtant y ont laissé une auréole de souvenir : elles y furent, elles y restèrent.
POM-POM-POM s’attache à ces taches récurrentes pendant que son Papa désespère, rouspète et vocifère. POM-POM-POM a peur. C’est pourtant joli et émouvant ces taches qui ne veulent pas partir...Personne n’est de cet avis.
Toutes les poudres sont testées. Du Mir au St-Marc en passant par Bonux qu’elle préfère parce qu’il vient avec un cadeau. Les taches palissent, s’évaporent, se dissolvent en myriades de bébé-taches toutes plus attendrissantes les unes que les autres de par leur obstination.
C’en est trop pour son Papa devenu, on ne sait pas au juste à partir de quand, un Don Quichotte forcené à l’assaut d’improbables ennemis. Il vocifère de plus belle. Sa voix habituellement amie, se cabre sous l’effet de la colère. Le ton monte, sa vue s’obscurcit jusqu’au rouge, ses narines enflent, il est en sueur, c’est Neptune déchaîné sur des flots violacés. Tremblent les murs et les enfants. C’est le courroux du père, le mieux est de s’éclipser.
POM-POM-POM court se réfugier sous son lit pour ne plus dire un mot.Ca n’amuse plus personne quand elle répète qu’elles sont bien jolies tout de même ces taches que, regardez-bien là ça fait une tête de lapin, et là encore on dirait une aile...
Et même pire, ça énerve tout le monde.
Sous le lit, c’est comme une cabane dans les branches, un ptit coin peinard bien à l’abri de la folie des autres. POM-POM-POM espère simplement que sa moyenne-grande sœur a retiré les araignées et chassé tous les moutons.
Et tout à coup tombe le glas du silence.
Elle attend en apnée.
Peut-être bien que son Papa l’a cherche. Pour la tuer peut-être.
Elle sait bien qu’elle est de trop. Qu’elle agace à toujours répondre et contredire. Qu’il l’a tuera très certainement à la première occasion ou l’enverra en pension, la séparera de ses sœurs... que...que, elle étouffe en pensant à son triste sort, suffoque, halète sous le poids de tant et tant de chagrin et d’injustice...
et, trop c’est trop, éclate en bruyants sanglots.
Tout de suite ensuite, elle entend son Papa depuis la cuisine :
« Bof, on s’en fout, après tout, de ces pauvres taches !!! »
et de préparer la soupe, généreusement pour tout son petit monde.
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Style : Nouvelle | Par yolli | Voir tous ses textes | Visite : 308
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