Cours Marine, cours tant que tu peux, et tu verras le bonheur te renversera et simulera son existence dans ton cœur amoindri.
Cours Marine, cours plus vite pour échapper aux destins amorphes de nos campagnes sans vie, de nos compagnes blasées. A la lueur des projecteurs multicolores des nuits citadines, tu brilleras de mille feux et resplendiras parmi la masse et les prédateurs. En suscitant jalousie et désir, tu sentiras ta fierté, oublieras ta simplicité, glisseras dans le sombre côté de la beauté. De verres en verres, puis de joints en joints, puis de rails en rails, tu pèteras des milliers de neurones et tu égareras sur le parking des idéaux ta lucidité et ce qu’il te restait d’humanité.
Cours Marine, cours maintenant pour échapper à la déchéance finale, échappe toi de ces misères. Vois comme que tu n’es plus belle, vois l’œuvre du temps sur ton corps et ton approche de la vie. Si seuls quelques artifices te donnent vie, cours Marine, cours jusque dans mes bras, peut-être n’est-il pas trop tard pour effacer ces années de chaos. Depuis que tu es partie vers la cité, toi mon amie de naissance, la compagne de mon enfance, le sourire de mon adolescence, as-tu seulement imaginé les efforts que j’ai déployés pour chasser de moi la frustration et le malheur de t’avoir vu quitter nos racines, et la souffrance qui fut la mienne quand tes parents me racontaient, les yeux dans le vague, la décadence qui rythmait ta vie.
Cours Marine et agrippe moi puis serre moi, s’il te reste de la force, je veux sentir de la violence, l’expiation des actes passés et les bulles noirâtres se détacher de ta peau toujours douce, comme autant de dépendances fuiraient leur habitat préféré. Je te regarde partir Marine, sur ce quai froid et provincial, en ce mois de novembre, je te regarde avec émotion à ta fenêtre, tu essayes de me sourire, tu essayes de me faire croire que tu es "bien", que tu vas "bien", que tu as de nombreux amis non dérangés, puis j’incline légèrement la tête en signe d’acquiescement mais je te connais bien Marine, depuis trente six ans maintenant, et sais lire dans tes yeux.
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Style : autre | Par john_limousin | Voir tous ses textes | Visite : 645
Coup de cœur : 14 / Technique : 12
Commentaires :
pseudo : Billie
Je ne sais pas si c'est fictif en tout cas peu importe, c'est émouvant et ça me touche moi particulièrement. Au risque de faire jouer mon côté nombriliste comme toujours, marine c'est moi il y a encore quelques temps... Juste pour dire, cher John c'est extrêmement dur et complexe de sauver quelqu'un de lui-même. ca prend du temps et une quantité inconsidérable d'énergie! Mais lorsque l'on y parvient, crois moi le monde, la vie change, on se sent grand, imbattable... Et sais quoi, on l'est!Lache rien Marine a besoin de type comme toi. Au plaisir l'ami...
pseudo : BAMBE
Un texte émouvant, une belle et fluide écriture enchâssée d'émotion, j'aime.
pseudo : john_limousin
Merci pour vos commentaires. Billie, c'est fictif mais écrit avec la souffrance des personnages.
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